Sommaire
Dernièrement, quelques commentaires exprimaient leur mécontentement quand à l'atmosphère et aux propos tenus dans les commentaires sur ce site.[référence nécessaire].
J'ai pensé qu'un texte de Paul Graham, intitulé « How to Disagree » serait un bon point. Vous pouvez trouver l'original en ligne, mais je vous le traduis ici, si vous ne souhaitez pas lire l'anglais (mais vous pouvez lire les deux).
Je dois vous prévenir que c'est un peu long.
Le web est en train de changer l'écrit en conversation. Il y a vingt ans, les écrivains écrivaient, les lecteurs lisaient. Le web laisse aux lecteurs la possibilité de répondre, et ils le font de plus en plus — dans les fils des commentaires, sur les forums, et sur leurs blogues personnels.
Nombreux sont ceux qui répondent à quelque chose avec laquelle ils ne sont pas d'accord. Ce n'est pas surprenant. Être d'accord ne tend pas à motiver les foules autant que quand on n'est pas d'accord. En outre, il y a moins matière à tergiverser. On pourrait s'étaler sur quelque chose que l'auteur a dit, mais il a probablement déjà exploré les implications les plus intéressantes. Quand on n'est pas d'accord, on entre dans un territoire non exploré par l'auteur.
Le résultat c'est qu'il y a bien plus de controverse. Ça ne signifie pas que les gens sont plus en colère. Le changement structurel dans la manière dont nous communiquons est suffisant pour en expliquer le tout. Mais même si ce n'est pas la colère qui anime la controverse, il y a un danger que son augmentation puisse rendre les gens plus énervés. En ligne, en particulier, où il est aisé de dire des choses que l'on ne dirait pas en face à face.
Si nous allons exprimer notre avis contraire de plus en plus, nous devrions le faire correctement et avec tact. Que cela signifie-t-il ? La plupart des lecteurs est capable de faire la différence entre une attaque personnelle, et une réfutation raisonnée et bien construite, mais je pense qu'il peut être bénéfique de mettre des noms sur chaque étape, alors voici un essai de hiérarchie d'expression d'un avis contraire (DH pour Disagreement Hierarchy).
DH0. Attaque directe
Ceci est la plus basse forme de controverse, et probablement la plus commune. On a tous vu des commentaires tel que celui-ci :
T'es qu'un con !!!!!!!
Mais il est important de se rendre compte qu'une attaque directe plus élaborée n'a pas plus de poids. Ainsi, le commentaire
L'auteur n'est qu'un dilettante dont le nombril est l'unique centre d'intérêt.
n'est vraiment qu'une version prétentieuse du précédent.
DH1 Ad Hominem
Un attaque dite « ad hominem » n'est pas aussi faible qu'une attaque directe. Il se peut qu'elle ait un certain poids. Par exemple, si un sénateur écrit un article explicitant les raisons d'augmenter les salaires des sénateurs, quelqu'un pourrait répondre :
Bien entendu qu'il a de bonnes raisons. Il est lui-même sénateur.
Cela ne réfuterait pas du tout l'argument de l'auteur, mais ça aurait du sens d'après le contexte. Néanmoins, ça reste très faible, et s'il y a quelque chose qui cloche avec le raisonnement du sénateur, vous devriez dire ce que c'est ; dans le cas contraire, qu'est-ce que ça change qu'il soit un sénateur ?
Dire que l'auteur manque d'autorité pour écrire à propos d'un sujet est un variante d'ad hominem — et elle est particulièrement inutile, puisque les bonnes idées proviennent souvent de champs qui n'ont rien à voir. La question à traiter est si l'auteur a vu juste ou non. Si son manque d'autorité l'a poussé à commettre des erreurs, faites donc la lumière sur celles-ci. Dans le cas contraire, il n'y a pas vraiment de problèmes.
DH2. Réponse à l'intonation
À ce niveau, on commence à voir des réponses en relation avec l'écrit plutôt qu'avec l'auteur. La plus basse forme étant de s'attaquer à l'intonation que l'auteur a utilisée. Par exemple :
Je n'arrive pas à croire que l'auteur mette de côté le dessein intelligent d'une manière si cavalière.
Bien que ce soit mieux que d'attaquer l'auteur, ça reste bien bas. Il est bien plus important que l'auteur ait raison ou pas, que de savoir si la manière dont il l'a dite est plaisante. Et plus particulièrement parce que l'intonation d'un texte écrit est difficile à juger. Quelqu'un d'aigri à propos d'un sujet pourrait se sentir offensé par une intonation que d'autres lecteurs trouveraient neutre.
Ainsi, si la pire chose que vous pouvez dire à propos de quelque chose c'est son intonation, alors vous ne dites pas grand chose. L'auteur est désinvolte, mais il a raison ? C'est toujours mieux que s'il était grave, mais fourvoyé. S'il s'est trompé, il suffit de dire où.
DH3. Contradiction
À ce niveau, on a enfin des réponses concernant le contenu lui-même, plutôt que l'auteur ou la manière dont il s'est exprimé. Le plus simple étant d'exposer l'opposé de ce que dit l'auteur, sans, ou avec peu d'arguments convaincants.
C'est souvent combiné avec DH2, tel que :
Je n'arrive pas à croire que l'auteur mette de côté le dessein intelligent d'une manière si cavalière. Le dessein intelligent est une théorie scientifique légitime.
Une contradiction a parfois du poids, et il arrive que l'exprimer clairement suffise à voir que c'est exact, mais il est habituellement nécessaire d'argumenter correctement.
DH4. Contre argument
Au niveau 4, on atteint la première forme de controverse convaincante : le contre argument. Les niveaux précédents peuvent souvent être ignorés, puisqu'ils n'apportent presque rien. Un contre argument peut apporter quelque chose, mais le problème est souvent de comprendre quoi.
Un contre argument est une contradiction servie avec un raisonnement ou une preuve. Quand il est honnêtement ciblé contre l'argument originel, il peut être convaincant. Malheureusement, il est courant de voir des contre arguments ciblant quelque chose de légèrement différent. Bien souvent, deux personnes se querellant à propos de quelque chose, parlent, en fait, de choses différentes. Il arrive même qu'elles soient tout à fait d'accord, mais elles sont entraînées dans leur chamaillerie et ne s'en rendent pas compte.
Néanmoins, il est parfois des moments où il est tout à fait légitime de discuter d'un point légèrement différent : quand on sent que le cœur du sujet a été manqué. Mais alors, il faut le dire explicitement.
DH5. Réfutation
La forme la plus convaincante est la réfutation. C'est également la plus rare, car elle demande le plus de travail. En effet, la présente hiérarchie forme une sorte de pyramide, dans le sens où plus on monte, et moins souvent on la rencontre.
Pour réfuter quelqu'un, vous devez probablement le citer. Il vous faut trouver un passage qui vous semble erroné, et expliquer en quoi c'est le cas. Si vous n'arrivez pas à trouver un passage spécifique qui vous semble louche, il se peut que vous ayez à faire à un argument spécieux.
Généralement, bien que réfuter quelque chose implique une citation, l'inverse n'est pas nécessairement vrai. Certaines personnes citent des parties avec lesquelles elles ne sont pas d'accord, puis se rabaissent à un niveau 3 ou même 0.
DH6. Réfuter le point central
La force d'une réfutation dépend de son objet. La plus puissante étant celle dont l'objet est le point central d'un écrit.
Il arrive que, même à un niveau 5, on voit de la malhonnêteté délibérée, tel que quand quelqu'un réfute des points mineurs d'une argumentation. Parfois, la manière dont sont tournées les choses les rend plus proches d'un ad hominem que d'une vraie réfutation. Par exemple, corriger la grammaire ou des erreurs mineures de chiffres ou de noms. Sauf si la crédibilité de l'argumentation dépend de la valeur réelle de ces points, le seul but de les corriger est de discréditer l'auteur.
Réellement réfuter quelque chose demande d'en réfuter le point central, ou au moins l'un d'entre eux. Cela veut dire que l'on doit s'activer à expliciter le point central que l'on veut réfuter. Une bonne manière de le faire pourrait être la suivante :
Le point central de l'auteur semble être x, puisqu'il dit :
« citation »
Mais ce n'est pas vrai à cause des raisons suivantes :…
La citation doit réellement représenter le point central de l'auteur. Il est suffisant de réfuter quelque chose dont ce point central dépend.
Ce que cela signifie
Nous avons maintenant une manière de classifier les formes de réfutation. À quoi ça peut bien servir ? Une chose que cela ne donne pas, c'est une manière de tirer un gagnant. Les niveaux précédents décrivent à peine la forme d'un écrit, mais non son exactitude. Une réponse de niveau 6 peut tout à fait s'avérer erronée.
Malgré tout, cela permet de trier. Un argument de niveau 6 peut ne pas être convaincant, mais une réponse de niveau égal ou inférieur à 2 ne l'est jamais.
L'avantage évident d'une telle classification est de permettre aux gens d'évaluer ce qu'ils lisent. En particulier, cela les aidera à déterrer les arguments malhonnêtes. Quelqu'un d'éloquent peut donner l'impression de vaincre son opposant en utilisant des mots percutants. En fait, c'est probablement la qualité qui définie un démagogue. En donnant des noms aux différents niveaux de réfutations, nous donnons aux lecteurs critiques une épingle pour faire éclater de tels ballons.
Cela peut également aider les auteurs. La majeur partie de la malhonnêteté intellectuelle n'est pas intentionnelle. Quelqu'un qui s'évertue à s'attaquer au ton dont est présenté un propos peut très bien croire qu'il dit vraiment quelque chose. Se poser, et déterminer le niveau correspondant de l'argumentation peut nous inspirer à dire quelque chose de mieux tel qu'un contre argument, ou une réfutation.
Mais le plus grand bénéfice de bien réfuter n'est pas de rendre les conversations meilleures, mais c'est de rendre les personnes les tenant plus heureuses. Si vous étudiez ces niveaux, vous trouverez qu'il y a beaucoup plus de méchanceté au niveau 1 qu'au niveau 6. Vous n'avez pas besoin d'être méchant quand vous avez un réel argument à apporter. Même, vous ne voulez pas l'être. Si vous avez quelque chose à apporter, être méchant n'est qu'un encombrement.
Si augmenter le niveau rend les gens moins méchants, cela les rendra plus heureux. La plupart d'entre eux n'aiment pas spécialement être méchants ; ils le font car ils n'y peuvent rien.
J'espère que ça vous a intéressé. N'hésitez-pas à commenter maintenant !
# Ou en trollant
Posté par chimrod (site web personnel) . Évalué à 7.
Moi c'est à force de traîner sur dlfp que j'ai eu envie d'acheter La Dialectique éristique. C'est bien la preuve discuter avec des linuxiens nécessite un niveau d'exigence plus important qu'avec d'autres ^
[^] # Re: Ou en trollant
Posté par Jiehong (site web personnel) . Évalué à 8.
Quelle ironie ^ ^
[^] # Re: Ou en trollant
Posté par Anonyme . Évalué à 1.
Je l'ai dans ma bibliothèque depuis des années, c'est dommage, je n'ai jamais pris le temps de le lire.
[^] # Re: Ou en trollant
Posté par chimrod (site web personnel) . Évalué à 5.
Le livre est très intéressant.
On peut le lire sur un 1er niveau très pragmatique (l'énumération des stratagèmes) qui consiste à lire les différentes techniques pour pouvoir les reconnaître et éviter de tomber dedans quand on traîne sur les forums.
Le deuxième niveau de lecture pousse à se demander qu'est-ce qui valide une argumentation bien formée. Ça n'est visiblement pas la logique (puisque l'on démontré tout d'abord que la logique pouvait être biaisée à travers lesdits stratagèmes). Le livre ne propose pas de réponse ici, mais l'expérience nous permet de trouver des axes de solution : une bonne argumentation ne peut pas être d'une logique froide et implacable. Il faut prendre en compte la sensibilité des uns et des autres, trouver la formulation qui pourra être entendue par celui à qui l'on s'adresse etc. Le livre ne développe pas cette partie, mais en réfléchissant, on en vient à se dire qu'une bonne argumentation ne doit pas forcément être juste, elle doit juste être humaine (dans le sens : prendre en compte l'altérité dans son discours et son argumentation). Et au final ça me plaît :)
[^] # Re: Ou en trollant
Posté par Michaël (site web personnel) . Évalué à 4.
La logique seule ne saurait suffire, mais elle est une condition nécessaire!
Pour apprendre à bien argumenter, le plus simple est de lire de bonnes argumentations. On peut relire le classique Symposium de Platon ou des textes plus récents mais d'une clarté tout aussi admirable, comme De la division du travail social par Émile Durkheim.
# DH0 ?
Posté par _kaos_ . Évalué à 3.
Petites coquilles que j'ai relevé. Sans prétention de les avoir toutes vues !
t'attaquer -> d'attaquer
Un contradiction à -> Une contradiction a
plusheureuses -> plus heureuses
Rien de bien constructif donc :p
Matricule 23415
[^] # Re: DH0 ?
Posté par Jiehong (site web personnel) . Évalué à 2.
M. Graham dit que c'est du DH. 1, mais bon, je trouve que c'est important malgré tout (peut-être que parce que ça évite les commentaires de ce types, ou bien car ça rend plus sérieux, je ne sais pas).
Merci d'avoir relevé ces erreurs, mais je ne peux pas les corriger :/
[^] # Re: DH0 ?
Posté par _kaos_ . Évalué à 0.
Mouep, peut-être qu'un modo passera par là, si c'est utile.
À la base, je pensais faire un commentaire en disant que j'étais contre ton argumentaire et en le réfutant sur cette base argumentaire de mauvaise traduction. d'où le doute DH0/DH1.
Et puis oufti, la flemme du dimanche soir m'a pris.
Donc j'ai posté, et donc que malgré la classification, c'est du DH0.
M'enfin :)
Matricule 23415
[^] # Re: DH0 ?
Posté par Benoît Sibaud (site web personnel) . Évalué à 3.
Corrigé, merci.
# DH-1
Posté par sirrus . Évalué à 10.
ta gueule
[^] # Re: DH-∞
Posté par Le Gab . Évalué à 8.
Antisémite!
[^] # Re: DH-∞
Posté par _kaos_ . Évalué à 2.
Moment de réflexion…
J'ai ton IPv6 !
Matricule 23415
[^] # Re: DH-1
Posté par Maclag . Évalué à 6.
Cette réponse ne permet même pas de dire si tu as pris connaissance du contenu, et ne parlons pas de l'avoir compris.
Dès lors, ta crédibilité est perdue, et il est même difficile de tenir compte de ton commentaire.
En plus, c'est grossier.
Et puis quand on vois ta propre gueule, on se dit que c'est pas la fermer qu'il faut faire, mais la cacher!
(oui, il m'arrive de lire les journaux à rebours, et ça m'inspire…)
-----------> [ ]
# Une lecture amusante :
Posté par Zylabon . Évalué à 9.
https://fr.wikisource.org/wiki/L%E2%80%99Art_d%E2%80%99avoir_toujours_raison
L'art d'avoir toujours raison, Arthur Schopenhauer.
Il traite un peu du même sujet mais dans l'autre sens…
Please do not feed the trolls
[^] # Re: Une lecture amusante :
Posté par Dinosaure (site web personnel) . Évalué à 6.
J'aime particulièrement le trentième stratagème dont je vous laisse un petit aperçu:
[^] # Re: Une lecture amusante :
Posté par ZeroHeure . Évalué à 3.
Je rebondis, sur Descartes parce que c'est assez semblable à ce que qu'il avance au début du Discours de la méthode :
« Les hommes sont tous aussi intelligents les uns que les autres. La preuve, c'est que même les râleurs et les complexés s'estiment généralement bien servis. Étonnant que jamais personne ne se plaigne d'être débile, non ? J'en déduis que l'intelligence, la jugeote, le bon sens, la raison — appelez ça comme vous voulez —, chacun en a reçu une dose égale à la naissance. Comment se fait-il alors que tout le monde se chamaille et que les avis divergent ? Parce que certains sont plus futés que d'autres me direz-vous… Je vous réponds non : la raison c'est que chacun voit midi à sa porte et gamberge à sa façon. Car il ne suffit pas d'avoir un bon QI et des tonnes de matière grise, encore faut-il savoir s'en servir. » (Mise en français moderne : Frédéric Pagès)
"La liberté est à l'homme ce que les ailes sont à l'oiseau" Jean-Pierre Rosnay
# The wild troll
Posté par Big Pete . Évalué à 5.
Mouais, mouais, mouais… Cette partie de ton commentaire m'a immédiatement fait penser à l'ouverture du film "The Wild Bunch" de Sam Peckinpah. On y voit la bande à William Holden, déguisés en soldats, s’apprêtant à commettre une attaque de banque dans une ville de l'ouest, et qui passent devant un groupe d'enfants qui jouent à torturer des scorpions en les jetant à des fourmis rouges.
Extrait visible sur Daily Motion
Cette scène introductive prend toute sa force lors de la scène finale, où le spectateur averti prend subitement conscience qu'il est à la place des gamins du début en assistant au massacre.
Extrait visible sur Youtube
Je réfute donc cette partie de ton argumentation en évoquant Sam Peckinpah (reconnu comme un maître sur le thème de la violence au cinéma) et en affirmant : La plupart des gens n'aiment pas être méchants, certes, mais ils peuvent le devenir car cela leur procure du plaisir, et ça n'a rien avoir avec une question de niveau, on peut être intelligent, maitriser parfaitement l'art de l'argumentation et aussi être pervers. C'est peut-être ce que tu entend par le fait qu'ils n'y peuvent rien, c'est à dire que c'est dans leur nature. Mais je réfute aussi ce point. Ils y peuvent quelque chose, par le fait qu'il semble aussi dans la nature de l'homme de pouvoir s'élever au delà d'elle.
Faut pas gonfler Gérard Lambert quand il répare sa mobylette.
[^] # Re: The wild troll
Posté par Jiehong (site web personnel) . Évalué à 3. Dernière modification le 14 décembre 2014 à 18:40.
Sauf que je n'ai rien commenté du tout, mais j'ai traduit.
Vu que l'auteur parle de « la plupart des gens », tel que tu le dis, finalement, tu es d'accord, et tu parles du reste qui éprouverait du plaisir à l'être.
Pourquoi pas.
[^] # Re: The wild troll
Posté par Big Pete . Évalué à 5. Dernière modification le 14 décembre 2014 à 18:54.
Ha oui, j'avais zappé en cours de lecture que tu n'était pas l'auteur. C'est bien dommage, du coup, j'argumente avec qui moi ?
Non, sinon, je pense le contraire, la perversité (c'est à dire le fait de prendre du plaisir à être méchant) fait parti de la nature humaine. La preuve (illustrée par Peckinpah) c'est que les enfants l’expérimente très tôt et que les adultes peuvent la retrouver à l'occasion d'un spectacle au cinéma. Et que, du coup, c'est cette prise de conscience de notre nature intrinsèquement méchante qui nous permet de la dépasser. Penser qu'on est majoritairement gentils et que l'enfer c'est les autres, c'est le début des emmerdements, à mon humble avis.
Si tu préfère, il y a George Lucas sur ce thème avec son coté obscur de la force et ses Jedi. Mais je préfère Peckinpah, il tourne pas deux plombes autour du pot, te renvoi le tout dans la gueule à la fin et il ne vend pas des figurines en plastoc à la tonne.
Faut pas gonfler Gérard Lambert quand il répare sa mobylette.
[^] # Re: The wild troll
Posté par Jiehong (site web personnel) . Évalué à 1.
Bon, je vais quand même me lancer.
Tu parles de « nature humaine », mais je n'ai pas connaissance qu'une telle idée ait effectivement débouchée. C'était un postulat, mais il est bien difficile à prouver.
L'usage des « enfants », n'est pas forcément adéquate : très jeunes, le code morale leur est inconnu, et c'est ce que les adultes leurs dictent qui va les changer. Étant enfant, la notion de bien ou de mal n'est pas encore définie (tout dépend de l'âge), et tuer des fourmis tient bien plus de l'expérience que du plaisir de la tuerie.
Dans l'absolu, le plaisir, peu importe la source, n'est qu'un chemin vers un état sympathique au niveau personnel. Je ne suis pas convaincu que l'approche personnelle, égoïste et mauvaise soit celle qui gagne dans un groupe de milliers de personnes (pensons aux dictateurs).
Bref, ce n'est pas vraiment important, puisque ce cela ne remet pas en cause l'échelle proposé, mais juste les conclusions de l'auteur lui-même.
[^] # Re: The wild troll
Posté par Big Pete . Évalué à 2.
Ha merci ! Faut pas être timide comme ça, je suis pas méchant, hein :).
Sur la nature humaine, disons que c'est une manière de parler de la façon d'être assez particulière dans le règne animal de l'homme. Disons que même si l'idée n'est pas très claire, on voit a peu prés de quoi il retourne.
La notion de code moral est encore moins claire que le concept de nature humaine, si tu veux mon avis sur la question. La vision universelle d'un tel code et la possibilité que le fait d'être méchant viendrait d'une absence de son enseignement et, à mon avis, hautement spéculative. L'histoire contient de nombreuses références à des actes ignobles commis au nom d'un sois-disant code moral.
En plus de ça, je pense qu'un code moral, si il existe, n'est pas universel, mais personnel. Ce qu'il faut enseigner, c'est donc pas le code moral, c'est les outils pour s'en créer un (ce qu'on appelle la culture, par exemple). Pour ce qui est du bien et du mal, ma fois, c'est encore plus flou comme concept, amha.
Ouais, moi aussi j'évite d'aller dans les stades de foot. <-- ça, tu vois, c'est un exemple de méchanceté gratuite de nature "trollesque" qui me procure du plaisir. C'est mon coté pervers, mais je me soigne.
Bien sur que non, ce n'est pas important et l'échelle que l'auteur propose est très bien, mais que veux-tu il fait un temps pourri par chez moi, faut bien passer le temps ;).
Faut pas gonfler Gérard Lambert quand il répare sa mobylette.
[^] # Re: The wild troll
Posté par Kaane . Évalué à 10.
DH-0
Je ne peux pas te laisser dire ça, tu manques manifestement de connaissances sur la psychologie humaine,
DH-1
c'est une chose malheureusement courante chez les personnes techniques en général, et les ingénieurs informaticiens en particulier - les diverses formations "appliquées" faisant très rapidement l'impasse sur l'enseignement philosophique, la sociologie et la psychologie. Tout au plus y-a-t-il une année d'initiation à la philosophie au cours du cursus (mais avec un coefficient tellement faible qu'une totale incompréhension de la matière n'est pas réellement pénalisante)
DH-2
Donc non, la perversité n'est pas l’intérêt à la méchanceté
DH-3
La perversité ne se limite pas au plaisir d'être méchant, et la méchanceté n'est que rarement présente là ou se trouve la perversité
DH-4
tout d'abord parce que la méchanceté contient en elle-même la notion d’intérêt. La méchanceté traduit une volonté consciente de faire du mal - le mal involontaire relève d'autres traits de caractères (inconséquence, insensibilité, immaturité etc.) Mais surtout parce que la perversité est totalement déconnecté de la notion de mauvaiseté.
DH-5
Pervers viens de per virtutes qui signifie littéralement "en dehors de la droiture". La perversion s'entend comme étant une déviance par rapport à ce qui est communément admis et accepté par tous. Ça va des préférences sexuelles à la façon d'assaisonner sa cuisine. Au sens fort pervers signifie qui est hors de la qualité (sous entendu de la qualité reconnue socialement) - c'est à dire toute action qui pourrait être faite d'une façon considérée comme louable par le regard sociale mais qui est effectuée différemment. Autant dire tout de suite que suivant le regard social que l'on considère (que ce soit dans le temps ou dans l'espace) la notion de perversion change radicalement. Ce qui est pervers pour un taliban ne le sera pas forcément pour un occidental athée, et ce qui était pervers en 1322 ne le sera probablement plus aujourd'hui.
DH-6
En fait tu sembles confondre de nombreux éléments et arriver à une conclusion fallacieuse de ce fait. Des enfants qui font dévorer un scorpion par des fournis c'est de la cruauté, c'est à dire la mentalité à prendre plaisir à la souffrance d'un autre être vivant. Même si il est généralement accepté qu'une personne cruelle finira par avoir un rôle actif dans l'infliction de cette souffrance (sadisme), l'effet défoulant qu'il y a à assister à la déchéance ou à la souffrance d'autrui, le coté confortant qu'il y a à voir ceux qui ont voulu monter trop haut ou risquer trop gros se faire descendre en flammes, c'est la catharsis. Aucun plaisir sadique dans la catharsis - juste un sentiment de légitimité à être resté à sa place. Après il y tout le distinguo entre socio-psychopathie, violence et brutalité.
Le socio-psychopathe ne tire aucun plaisir à infliger de la douleur, mais ne voit pas non plus l’intérêt qu'il y a faire des efforts pour éviter de faire souffrir autrui. La brutalité est le fait de recourir à l'usage de la force, généralement physique, pour obtenir un état que l'on pourrait probablement pas avoir autrement. C'est généralement un aveu d'impuissance ou d'incompétence (même si cet aveu d'incompétence peut être lointain de l'acte de brutalité, comme par exemple le mari qui bat sa femme car il est incapable de gérer une situation passée ou présente dans laquelle sa femme n'est absolument pas impliquée). La violence est juste l'expression d'une volonté consciente de destruction. Certes l'action de tuer un manifestant pacifique est violente, mais l'action d'extraire une tumeur d'un corps malade l'est aussi. Détruire les préjugés d'un autre temps (comme par exemple l'homophobie) est également une action violente, elle est d'ailleurs perçue comme une agression par l'autre bord.
Une fois toutes ces distinctions en main, il convient de remarquer que bien qu'il y ait un parallèle entre la scène d'introduction du film et la scène de bataille, ce n'est pas sur les similitudes que Peckinpah s'attarde mais sur les différences. Dans la scène d'ouverture toutes les classes sociales d'enfants sont présentes, et les cavaliers jouent le rôle du regard social. Ils n'arrivent pas à voir ce que font les enfants et passent leur chemin, les enfants eux sont soulagés de ne pas avoir été pris la main dans le sac (ils ont donc pleinement conscience de la mauvaiseté de leurs actes). Et la curiosité n'est levée qu'au dernier moment, elle reste donc une excuse pour les adultes responsables que les spectateurs sont supposés être. Ils ne pouvaient pas s'indigner, ils ne savaient pas ce qu'il se passait. Et quand ils l'apprennent on passe à la scène suivante.
Rien à voir dans l'esprit avec la scène du fortin. Là les classes sociales sont clairement séparés, le regard social de chaque coté pousse à la brutalité. Tout le monde sait ce qui se passe au sein du fortin (aussi bien les protagonistes que les spectateurs). Sauf que cette fois ci il s'agit d'humains. Les combattants jouent le rôle des fourmis, les civils sont les scorpions. On sait que les fourmis sont innombrables et que les scorpions ne peuvent pas se défendre et se feront dévorer d'une façon ou d'une autre. La plus belle illustration est quand un soldat utilise une prostituée comme bouclier humain et charge un soldat adverse ainsi protégé (après tout ce n'est qu'un scorpion, elle mérite de mourir).
Il ne s'agit donc pas ici de dénoncer la brutalité comme inhérente à l'homme, mais c'est au contraire l'inhibition du sens moral qui est visé. Les enfants savent que ce qu'ils font est mal, mais il continuent, les cavaliers savent que les enfants sont en train de faire une bêtise mais passe leur chemin. C'est cette capacité d'inhibition qui poussée à son paroxysme donne la scène du fortin, les différents protagonistes combattants finissent par ne plus avoir conscience de l'horreur de leurs actes au nom d'un pays, d'un idéal, d'un échappatoire, d'une exultation quelconque, le tout avec la bénédiction des regards sociaux respectifs.
C'est donc aussi bien la capacité d'inhibition de la sensibilité à la mauvaiseté qui est visée, que l'acceptation tacite de la société vis à vis de cette inhibition (qui n'est donc plus une perversion par définition).
N.B : j'ai conscience que faire les DH- dans l'ordre est extrèmement agressif, diplomatiquement il aurait mieux valu les faire en sens inverse. Mais le lecteur se serait cassé les pieds…
[^] # Re: The wild troll
Posté par Big Pete . Évalué à 2.
Tu as raison, j'y connais rien (sérieusement, hein, j'y connais vraiment rien) Mais bon, je demande qu'a comprendre.
Je suis fait comme un rat, si en plus je te dit que j'ai coté biker, je pense que je suis foutu.
Oui mais la méchanceté peut-être la conséquence de la perversité, non ?
Ouais, ça discute, une telle affirmation, je pense.
Bon ok, tu joue sur les mots, mais tu a raison de le faire. Je ne prenais pas le sens de pervers dans ce sens là, plus général, qui semble être le bon, mais comme le fait de prendre du plaisir à la souffrance de l'autre, comme un genre de contraire à l'empathie si tu veux, ce qui correspondrait à un sens dérivé de mon propre sens moral. Je suis donc perverti par mon propre sens moral et mon incompétence en psychologie humaine. Pour être franc, ça ne m'étonne pas, me connaissant.
Je trouve ton analyse "sociale" de ce chef d’œuvre très intéressante et particulièrement pertinente. Le seul point sur lequel j’achoppe, c'est quand tu dit :
ça ne colle pas. La symbolique associé aux scorpions ne peut pas coller avec l'innocence supposée des civils. Je pense qu'il s'agit bien des membres du gang, dont l'existence et le mode de vie libre et sauvage est condamné par l'arrivée de la civilisation dans l'ouest sauvage (les fourmis). (Ici tu peux me balancer un DH-1 sur mon coté biker, amha).
J'aime beaucoup ta conclusion, beaucoup plus optimiste que la mienne.
Faut pas gonfler Gérard Lambert quand il répare sa mobylette.
[^] # Re: The wild troll
Posté par Kaane . Évalué à 4.
ça ne colle pas. La symbolique associé aux scorpions ne peut pas coller avec l'innocence supposée des civils.
C'est là toute la force de l'analogie. On imagine que les cavaliers auraient fait s’arrêter les enfants si ils avaient pris le temps de voir ce qu'ils faisaient, et par prolongation le spectateur est supposé être "choqué" par la torture de ces "pauvres" scorpions. Par contre les enfants et les prostitués que les deux camps méprisent n'ont même pas la considération qu'aurait eu un scorpion. La prostitué qui se retrouve exactement dans la situation du scorpion (jetée en pâture à une mort atroce sans espoir de défense) est le point d'orgue de cette analogie. Au final elle bénéficie de la même miséricorde que le scorpion : aucune. Au final dans une situation similaire les civils ne bénéficient même pas de l'empathie que l'on prêtait aux scorpions.
[^] # Re: The wild troll
Posté par _kaos_ . Évalué à 0. Dernière modification le 14 décembre 2014 à 23:15.
Matricule 23415
[^] # Commentaire supprimé
Posté par Anonyme . Évalué à -9.
Ce commentaire a été supprimé par l’équipe de modération.
[^] # Re: The wild troll
Posté par maxmasou . Évalué à 0.
1047 mots pour une réponse! C'est ce qu'on appelle approfondir un point…!!!
# Il te manque un niveau
Posté par Enzo Bricolo 🛠⚙🛠 . Évalué à 3.
Le DH-1
# C'est génial !!
Posté par netchaiev . Évalué à 2.
Il n'y a qu'ici ou l'on peut passer des heures à discuter sur de tels concepts - (on cite même Schopenhauer !!)
Qui a dit que l'informaticien (au sens large) était un asocial, myope,boutonneux et n'aimait que le mode console avec un écran monochrome … ?
Bref, loin de linux, j'apprends plein de choses .
Merci LinuxFR d'exister !!!
[^] # Re: C'est génial !!
Posté par eingousef . Évalué à 10.
C'est moi. :o
*splash!*
[^] # Re: C'est génial !!
Posté par kowalsky . Évalué à 4.
Le journal montre justement que le l'informaticien (de passion) est asocial vis à vis du plus grand nombre (moche et boutonneux ne sont que des causes ou effets de bords, c'est selon).
Je m'explique.
L’intérêt pour la dialectique, l’algorithmie, les maths, la conception des choses (l'ordinateur n'est souvent pas le seul centre d'intérêt d'un informaticien passionné), etc n'est pas la norme à notre époque (non, les 'geeks' collectionnant des peluches Yoshi ne sont pas des informaticiens (même si ils peuvent aussi l'être)). Du coup, l'informaticien se retrouve un peu à la marge quand les discutions tournent au foot, people ou même l’atterrissage de Philae (l’événement en lui même est intéressant, en parler comme d'un people avec toutes les raccourcies scientifique qui vont avec, le fait que deux jours après ce soit oublié, etc…). Donc l'informaticien se tient un peu en marge de ce genre de discussion.
Il est donc classé comme asocial.
Même si il échange beaucoup avec ses semblables (par internet, ou pas). Il est donc social, mais le groupe est plus petit (élitiste ?).
[^] # Re: C'est génial !!
Posté par Thomas Douillard . Évalué à 1.
Non, je pense pas que ce soient des caractéristiques d'un informaticien.
Ce que tu énonce ressemble surtout à une forme d'élitisme, mais d'une part tous les informaticiens ne sont pas élitiste: pour moi il y a une énorme différence entre la passion qui pousse à aller plus loin, ce qui est en commun entre tous ici, et l'élitisme, qui pousse à penser que comme tu en sais plus que les autres tu es supérieur et les autres (ceux qui ne poussent pas) sont pas intéressants.
Ton post transpire l'élitisme. Moi j'ai énormément apprécié d'entendre parler des gens ordinaires de Philae, et discuter avec, par exemple.
[^] # Re: C'est génial !!
Posté par kowalsky . Évalué à 6.
Pour moi ce ne sont pas des caractéristiques d'informaticien. Ce sont des caractéristiques de passionnés. Dans toute les disciplines, quand tu es passionné, plus tu sais, plus tu veux savoir.
…
Mon poste transpire l'élitisme et tu apprécie "entendre parler les gens ordinaires" ! J’espère que tu te rend compte que tu te places hors des gens ordinaires par la tournure de ta phrase :) .
Pour le coté élitiste de mon poste, ce n'est pas voulu. Les discutions que j'ai entendu sur Philae par exemple étaient parfois ridicules. Du genre "Vive la France", "On a réussie", "\o/ les nazes, pourquoi les pieds ne sont pas ouvert, ils testent pas leur grosse kangoo spatiale avant de l'envoyer ?", et j'en passe. J'ai pu discuter avec des "gens ordinaires" sur ce sujet aussi, je te rassure.
Pour le coté élitiste d'un groupe (pas que d'informaticien), ça vient du fait que les gens extérieur "ne savent pas" pour la plupart les bases et encore moins les complexités du groupe. Les leaders implicites, ce vers quoi il faut tendre, etc. Ça peut ressembler à de l'élitisme, des fois ça l'est, mais c'est souvent juste un groupe de gens qui ont accumulés plus de connaissance que le commun sur un sujet.
D'ailleurs, souvent ce genre groupe cherche à se diffuser, ce n'est alors plus de l'élitisme !
[^] # Re: C'est génial !!
Posté par Thomas Douillard . Évalué à 1.
La dernière en particulier n'est pas si idiote, en tout cas il y a de quoi rebondir étant donné que c'était un des trucs sur lesquels ils ont évidemment beaucoup travaillé. ''"On a réussie"'' je trouve que ça n'a rien de ridicule, c'est un sentiment de fierté d'appartenance à l'humanité. Sérieusement ça fait plaisir, pourquoi bouder son plaisir ? Et la diffusion de l'évènement et la com' autours avec justement le soucis du partage, d'explication, c'est génial. Pour le coup c'est tout sauf de l'élistisme, et les nombreuses réactions sont la récompense de ça.
Je suis entièrement d'accord avec toi, tant que les sachants ne méprisent pas les non sachants on est pas dans l'élitisme. C'était la toile de fond de mon post.
[^] # Re: C'est génial !!
Posté par Thomas Douillard . Évalué à 1.
Bref, ce que j'aurai du dire depuis le début c'est que c'est débile de faire l'association informaticien = élitiste, c'est juste comme tout groupe, il y a des élitistes dedans. À noter aussi que plein d'informaticiens sont pas sur linuxfr, dont certain dont la passion pour le sujet se limite à se payer une vie avec l'argent que ça rapporte.
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