Si j'ai bien compris, c'est quand même assez gonflé comme argumentation. Ça serait bien que ça aille au bout, mais sans être spécialiste du tout, ça ne me semble pas gagné d'avance. La GPL est assez explicitement un contrat entre les auteurs du code et les distributeurs… Si le distributeur n'a pas fourni la GPL aux utilisateurs finaux, je n'ai pas compris sur quelle base on pouvait considérer qu'il y avait un contrat logiciel. Mais bon, si ça passe, tant mieux pour tout le monde.
Tiré du préambule de la GPL V2 (version de la GPL utilisée dans le litige) :
Pour protéger vos droits, il nous est nécessaire d'imposer des limitations qui interdisent à quiconque de vous refuser ces droits ou de vous demander d'y renoncer. Certaines responsabilités vous incombent en raison de ces limitations si vous distribuez des copies de ces logiciels, ou si vous les modifiez.
Par exemple, si vous distribuez des copies d'un tel programme, à titre gratuit ou contre une rémunération, vous devez accorder aux destinataires tous les droits dont vous disposez. Vous devez vous assurer qu'eux aussi reçoivent ou puissent disposer du code source. Et vous devez leur montrer les présentes conditions afin qu'ils aient connaissance de leurs droits.
Traduction non officielle prise sur le site de l'april.
Oui, je sais bien, mais il s'agit donc d'un contrat entre l'auteur et le distributeur, qui accepte le contrat en distribuant le logiciel. Si l'auteur pense que le distributeur ne respecte pas de contrat, il peut le poursuivre en justice. Mais du point de vue de l'utilisateur, c'est beaucoup moins clair. Si le distributeur fournit la GPL mais ne la respecte pas, alors oui, l'utilisateur doit pouvoir faire quelque chose. Mais si le distributeur ne fournit pas la GPL, il n'est pas clair que l'utilisateur ait des droits à faire valoir. Même s'il pouvait prouver que le soft distribué correspond à un logiciel disponible sous GPL, il n'est pas prouvé que la version distribuée est bien couverte par la GPL (l'auteur a très bien pu accorder une licence exclusive non-GPL au distributeur).
En tout cas, c'est à ma connaissance ce qui s'est toujours dit sur les forums consacrés au logiciel libre. Si en tant qu'utilistateur tu t'aperçois qu'on ta refilé un soft GPL sans le mentionner et sans te fournir ni la licence, ni les droits qui vont avec (accès au code etc), tu ne peux rien faire car la GPL n'a pas été contractée avec toi. Tu peux juste prévenir l'auteur du logiciel sous GPL pour qu'il fasse respecter le contrat avec le distributeur.
Après, s'il y a un changement de jurisprudence, tant mieux, parce que ça participe à la défense des droits du consommateur. Mais ça n'a l'air que le début d'un long combat juridique incertain, et ça n'est pas clair du tout que le résultat puisse être transférable dans les autres pays.
En tant qu'utilisateur tu bénéficies d'un logiciel qui a t'a été distribué. Tu peux donc faire valoir un préjudice si tout ne t'a pas été distribué comme indiqué dans la licence, non ? Dans la mesure où celle-ci fixe des obligations au distributeur envers les destinateurs de cette distribution. L'existence du préjudice pourrait dans ce contexte se suffire à elle-même, contrat ou pas.
Tu peux donc faire valoir un préjudice si tout ne t'a pas été distribué comme indiqué dans la licence, non ?
La licence que tu as obtenue par le distributeur du logiciel en même temps que le logiciel, oui. Mais si le distributeur ne t'as pas fourni de licence, ou t'a fourni une licence incorrecte (licence proprio par exemple), tu n'as pas contracté la GPL avec le distributeur, et j'ai du mal à voir sur quelle base légale tu peux le poursuivre. Recel de contrefaçon peut-être?
J'avoue que je n'ai pas compris la décision du tribunal de Californie, c'est pour ça que je posais la questions. Déja que je n'y comprends pas grand chose en droit, mais en plus en droit américain…
En gros, pour moi, pour qu'il y ait un contrat, il faut que les contractants soient d'accord sur le fait qu'il y ait un contrat et sur la nature du contrat. Le contrat peut être formalisé par une signature, ou simplement tacite (par exemple, les conditions générales de vente dans un magasin, le fait de passer en caisse vaut acceptation).
Du coup, si le distributeur D fournit un binaire à l'utilisateur U, et fournit la GPL avec le binaire, alors U peut demander à D le code source ou tout de dont il a droit avec la GPL. Si D refuse, -> tribunal. OK.
Mais si D ne fournit pas de licence à U; ou une licence proprio, comment U peut reprocher à D de ne pas respecter la GPL alors que D n'a jamais dit à U que le soft était sous GPL? Dans ce cas, la GPL n'est pas un contrat conclu entre D et U. On est bien d'accord que D aurait dû fournir la GPL du fait du contrat qu'il avait conclu avec l'auteur A du logiciel. En ne fournissant pas la GPL à U, D a cassé le contrat entre D et A, et A est en droit d'attaquer D pour contrefaçon.
En particulier, ça n'est pas parce que des versions GPL d'un logiciel circulent que toutes les copies du logiciel sont sous GPL. U n'a dont aucune base pour prétendre que D aurait dû lui fournir le logiciel sous GPL. A aurait très bien pu fournir une copie du logiciel à D sous une autre licence que la GPL (la GPL n'est pas exclusive).
Bref, je ne suis pas sûr de comprendre. En particulier, je n'ai pas pigé si le distributeur avait fournit la GPL (et refusé ensuite les droits associés), ou bien s'il avait simplement changé la licence. Si c'est le deuxième cas, alors je n'ai pas compris l'argument.
Bon, si je comprends bien le premier lien https://www.theregister.com/2022/05/16/vizio_gpl_contract/ , c'est exactement ça la question. Si la GPL est une licence 'pure', alors elle ne concerne que l'auteur et le distributeur. Mais si la GPL est aussi un contrat, alors l'utilisateur peut-être considéré comme une "third-party" (un "tiers au contrat" en droit français?).
Apparemment, le principe existerait aussi en droit français. D'après https://www.lettredesreseaux.com/P-233-678-P1-tiers-au-contrat.html, "Toutefois, la jurisprudence admet qu’un tiers au contrat puisse se prévaloir du manquement d’une des parties à ses obligations contractuelles pour engager la responsabilité délictuelle de la partie fautive lorsque la faute commise lui cause un préjudice.".
C'est donc en effet encore plus intéressant que ce que je pensais.
Mais si le distributeur ne t'as pas fourni de licence, ou t'a fourni une licence incorrecte (licence proprio par exemple), tu n'as pas contracté la GPL avec le distributeur, et j'ai du mal à voir sur quelle base légale tu peux le poursuivre. Recel de contrefaçon peut-être?
éventuellement escroquerie? Le distributeur a vendu un truc qu'il n'avait pas le droit de vendre de cette façon: du code qui ne lui appartient pas et qu'il n'a le droit de distribuer que sous certaines conditions définies par son contrat avec l'entité qui a le copyright sur le code (la GPL, donc).
Pour imaginer un truc un peu similaire, c'est comme si le locataire d'un logement essayait de vendre ce logement à quelqu'un d'autre? J'imagine que l'acheteur a quelques moyens de recours dans ce cas (et le vrai propriétaire du logement aussi).
Je crois que dans ce cas ça doit être "tromperie", qui doit être plus précis que "escroquerie". J'ai l'impression que seul l'ayant droit peut poursuivre pour contrefaçon et recel de contrefaçon.
J'imagine qu'il y a en effet "tromperie", mais le préjudice ne va pas être énorme. Si le logiciel fonctionne correctement, la seule chose que tu ne peux pas faire est de le modifier, diffuser, etc. À moins que tu aies des arguments en béton, j'ai peur que tu ne puisses demander qu'un euro symbolique…
Ce qui est fatigant c'est le nombre de développeurs qui ne comprennent pas le principe des licences. Combien de fois j'ai déjà entendu encore à l'école ou dans mes anciennes entreprises « c'est gratuit on peut l'utiliser ».
Les développeurs nouvelles générations sont mal formés. Parce qu'ils croient que c'est sur GitHub on peut faire tout et n'importe quoi.
J'aime pas la GPL personnellement, mais j'aime voir les entreprises privatrices se faire emmerder quand ils respectent pas le principe des licences.
git is great because linus did it, mercurial is better because he didn't
# Bonne nouvelle... mais croisade difficile
Posté par arnaudus . Évalué à 3.
Si j'ai bien compris, c'est quand même assez gonflé comme argumentation. Ça serait bien que ça aille au bout, mais sans être spécialiste du tout, ça ne me semble pas gagné d'avance. La GPL est assez explicitement un contrat entre les auteurs du code et les distributeurs… Si le distributeur n'a pas fourni la GPL aux utilisateurs finaux, je n'ai pas compris sur quelle base on pouvait considérer qu'il y avait un contrat logiciel. Mais bon, si ça passe, tant mieux pour tout le monde.
[^] # Re: Bonne nouvelle... mais croisade difficile
Posté par Papey . Évalué à 5.
Tiré du préambule de la GPL V2 (version de la GPL utilisée dans le litige) :
Traduction non officielle prise sur le site de l'april.
[^] # Re: Bonne nouvelle... mais croisade difficile
Posté par arnaudus . Évalué à 5.
Oui, je sais bien, mais il s'agit donc d'un contrat entre l'auteur et le distributeur, qui accepte le contrat en distribuant le logiciel. Si l'auteur pense que le distributeur ne respecte pas de contrat, il peut le poursuivre en justice. Mais du point de vue de l'utilisateur, c'est beaucoup moins clair. Si le distributeur fournit la GPL mais ne la respecte pas, alors oui, l'utilisateur doit pouvoir faire quelque chose. Mais si le distributeur ne fournit pas la GPL, il n'est pas clair que l'utilisateur ait des droits à faire valoir. Même s'il pouvait prouver que le soft distribué correspond à un logiciel disponible sous GPL, il n'est pas prouvé que la version distribuée est bien couverte par la GPL (l'auteur a très bien pu accorder une licence exclusive non-GPL au distributeur).
En tout cas, c'est à ma connaissance ce qui s'est toujours dit sur les forums consacrés au logiciel libre. Si en tant qu'utilistateur tu t'aperçois qu'on ta refilé un soft GPL sans le mentionner et sans te fournir ni la licence, ni les droits qui vont avec (accès au code etc), tu ne peux rien faire car la GPL n'a pas été contractée avec toi. Tu peux juste prévenir l'auteur du logiciel sous GPL pour qu'il fasse respecter le contrat avec le distributeur.
Après, s'il y a un changement de jurisprudence, tant mieux, parce que ça participe à la défense des droits du consommateur. Mais ça n'a l'air que le début d'un long combat juridique incertain, et ça n'est pas clair du tout que le résultat puisse être transférable dans les autres pays.
[^] # Re: Bonne nouvelle... mais croisade difficile
Posté par Papey . Évalué à 2.
En tant qu'utilisateur tu bénéficies d'un logiciel qui a t'a été distribué. Tu peux donc faire valoir un préjudice si tout ne t'a pas été distribué comme indiqué dans la licence, non ? Dans la mesure où celle-ci fixe des obligations au distributeur envers les destinateurs de cette distribution. L'existence du préjudice pourrait dans ce contexte se suffire à elle-même, contrat ou pas.
[^] # Re: Bonne nouvelle... mais croisade difficile
Posté par arnaudus . Évalué à 4.
La licence que tu as obtenue par le distributeur du logiciel en même temps que le logiciel, oui. Mais si le distributeur ne t'as pas fourni de licence, ou t'a fourni une licence incorrecte (licence proprio par exemple), tu n'as pas contracté la GPL avec le distributeur, et j'ai du mal à voir sur quelle base légale tu peux le poursuivre. Recel de contrefaçon peut-être?
J'avoue que je n'ai pas compris la décision du tribunal de Californie, c'est pour ça que je posais la questions. Déja que je n'y comprends pas grand chose en droit, mais en plus en droit américain…
En gros, pour moi, pour qu'il y ait un contrat, il faut que les contractants soient d'accord sur le fait qu'il y ait un contrat et sur la nature du contrat. Le contrat peut être formalisé par une signature, ou simplement tacite (par exemple, les conditions générales de vente dans un magasin, le fait de passer en caisse vaut acceptation).
Du coup, si le distributeur D fournit un binaire à l'utilisateur U, et fournit la GPL avec le binaire, alors U peut demander à D le code source ou tout de dont il a droit avec la GPL. Si D refuse, -> tribunal. OK.
Mais si D ne fournit pas de licence à U; ou une licence proprio, comment U peut reprocher à D de ne pas respecter la GPL alors que D n'a jamais dit à U que le soft était sous GPL? Dans ce cas, la GPL n'est pas un contrat conclu entre D et U. On est bien d'accord que D aurait dû fournir la GPL du fait du contrat qu'il avait conclu avec l'auteur A du logiciel. En ne fournissant pas la GPL à U, D a cassé le contrat entre D et A, et A est en droit d'attaquer D pour contrefaçon.
En particulier, ça n'est pas parce que des versions GPL d'un logiciel circulent que toutes les copies du logiciel sont sous GPL. U n'a dont aucune base pour prétendre que D aurait dû lui fournir le logiciel sous GPL. A aurait très bien pu fournir une copie du logiciel à D sous une autre licence que la GPL (la GPL n'est pas exclusive).
Bref, je ne suis pas sûr de comprendre. En particulier, je n'ai pas pigé si le distributeur avait fournit la GPL (et refusé ensuite les droits associés), ou bien s'il avait simplement changé la licence. Si c'est le deuxième cas, alors je n'ai pas compris l'argument.
[^] # Re: Bonne nouvelle... mais croisade difficile
Posté par arnaudus . Évalué à 8.
Bon, si je comprends bien le premier lien https://www.theregister.com/2022/05/16/vizio_gpl_contract/ , c'est exactement ça la question. Si la GPL est une licence 'pure', alors elle ne concerne que l'auteur et le distributeur. Mais si la GPL est aussi un contrat, alors l'utilisateur peut-être considéré comme une "third-party" (un "tiers au contrat" en droit français?).
Apparemment, le principe existerait aussi en droit français. D'après https://www.lettredesreseaux.com/P-233-678-P1-tiers-au-contrat.html, "Toutefois, la jurisprudence admet qu’un tiers au contrat puisse se prévaloir du manquement d’une des parties à ses obligations contractuelles pour engager la responsabilité délictuelle de la partie fautive lorsque la faute commise lui cause un préjudice.".
C'est donc en effet encore plus intéressant que ce que je pensais.
[^] # Re: Bonne nouvelle... mais croisade difficile
Posté par pulkomandy (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 3.
éventuellement escroquerie? Le distributeur a vendu un truc qu'il n'avait pas le droit de vendre de cette façon: du code qui ne lui appartient pas et qu'il n'a le droit de distribuer que sous certaines conditions définies par son contrat avec l'entité qui a le copyright sur le code (la GPL, donc).
Pour imaginer un truc un peu similaire, c'est comme si le locataire d'un logement essayait de vendre ce logement à quelqu'un d'autre? J'imagine que l'acheteur a quelques moyens de recours dans ce cas (et le vrai propriétaire du logement aussi).
[^] # Re: Bonne nouvelle... mais croisade difficile
Posté par arnaudus . Évalué à 3.
Je crois que dans ce cas ça doit être "tromperie", qui doit être plus précis que "escroquerie". J'ai l'impression que seul l'ayant droit peut poursuivre pour contrefaçon et recel de contrefaçon.
J'imagine qu'il y a en effet "tromperie", mais le préjudice ne va pas être énorme. Si le logiciel fonctionne correctement, la seule chose que tu ne peux pas faire est de le modifier, diffuser, etc. À moins que tu aies des arguments en béton, j'ai peur que tu ne puisses demander qu'un euro symbolique…
# Ce n'est pas en France
Posté par cg . Évalué à 6.
Il faut préciser que la décision concerne le droit États-unien. Ceci dit ça reste une bonne nouvelle !
[^] # Re: Ce n'est pas en France
Posté par Misc (site web personnel) . Évalué à 2. Dernière modification le 18 mai 2022 à 17:35.
Plus précisément en Californie.
Je sais pas si à partir de la, ça reste que dans l'état, si ça s’étend sur le 9eme circuit de la cour d'appel, ou sur tout le territoire fédéral.
# C'est fatigant
Posté par David Demelier (site web personnel) . Évalué à 10.
Ce qui est fatigant c'est le nombre de développeurs qui ne comprennent pas le principe des licences. Combien de fois j'ai déjà entendu encore à l'école ou dans mes anciennes entreprises « c'est gratuit on peut l'utiliser ».
Les développeurs nouvelles générations sont mal formés. Parce qu'ils croient que c'est sur GitHub on peut faire tout et n'importe quoi.
J'aime pas la GPL personnellement, mais j'aime voir les entreprises privatrices se faire emmerder quand ils respectent pas le principe des licences.
git is great because linus did it, mercurial is better because he didn't
# Liens anglophones
Posté par Benoît Sibaud (site web personnel) . Évalué à 6. Dernière modification le 18 mai 2022 à 11:20.
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