L’exploration et le calcul de l’espace : l’horlogère, l’astronome et l’astrophysicienne

33
31
déc.
2024
Science

En octobre 2024, on était allé à la conquête de l’espace, cette fois-ci, on va se concentrer sur l’exploration de l’espace vu de la Terre. Pour cela, on se penchera sur la vie et les travaux de trois femmes : Nicole-Reine Lepaute qui, au siècle des Lumières, a calculé la date du retour de la comète de Halley, Janine Connes qui prendra la direction du premier centre de calcul en France et Françoise Combes qui vient d’être élue présidente de l’Académie des sciences. C’est aussi l’occasion de voir l’évolution des outils utilisés en astronomie.

Phases de l’éclipse du soleil du 1er avril 1764
Illustration des douze phases principales selon les calculs de Nicole-Reine Lepaute

Sommaire

Préambule

Les deux dépêches consacrées à la conquête de l’espace dans le cadre de la journée Ada Lovelace étaient très américano-centrées, et il manquait l’aspect étude et découverte de l’espace qui en précède la conquête. Sans cette connaissance, il n’aurait pas été possible d’envoyer des satellites artificiels, d’aller sur la Lune, sur Mars ou encore de créer des stations spatiales, voire, de concevoir les télescopes Hubble et James Webb. D’où cette dépêche, et le choix de ces trois femmes pour contrebalancer un peu leur américano-centrisme.

Le choix a été guidé d’une part en tenant compte des informations dont je pouvais disposer, d’autre part de l’actualité : Janine Connes vient de mourir à l’âge de 98 ans et c’est une façon de lui rendre hommage, Françoise Combes vient d’être élue par ses pairs à la présidence de l’Académie des sciences.

Nicole-Reine Lepaute, l’horlogère

La vie de Nicole-Reine Lepaute nous est essentiellement connue grâce à l’Encyclopédie des dames de Jérôme Lalande. De fait les biographies que l’on peut trouver sur elle citent les mêmes passages en élucubrant souvent sur les relations qu’elle aurait pu avoir avec l’astronome. Mais comme LinuxFr.org n’est ni un site « people » ni un site de rencontre et que l’autrice de l’article n’aime généralement pas faire comme tout le monde, on vous renverra en fin de dépêche sur ces biographies.

Nicole-Reine Lepaute en quelques dates (et hauts faits)

Nicole-Reine Étable naît le 5 janvier 1723 à Paris. Elle n’est pas elle-même horlogère, mais elle épouse l’horloger Jean André Lepaute en 1749. Il deviendra le fournisseur officiel de la cour de Louis XV en 1750. Jean André Lepaute était réputé comme l’un des meilleurs horlogers de son temps. Quand il écrira son Traité d'horlogerie, contenant tout ce qui est nécessaire pour bien connoître et pour régler les pendules et les montres, c’est Nicole-Reine qui calculera la « longueur que doit avoir un Pendule simple pour faire en une heure un nombre de vibrations quelconque, depuis 1 jusqu’à 18000 » (table VI, pages 365 et suivantes du traité). Et on le sait parce qu’elle en est créditée.

Le couple fait la connaissance de l’astronome Jérôme Lalande en 1754. Elle commencera peu après à travailler avec lui. En 1757, elle calculera les dates du retour de la comète de Halley avec Lalande et Clairaut. Quand, en 1759, Lalande est chargé des éphémérides annuelles de l’Académie royale des sciences : La Connaissance des temps1, elle fera partie de l’équipe qui travaille sur les tables et éphémérides astronomiques.

En 1761, elle entre à l’Académie royale des sciences et belles lettres de Béziers. C’est, probablement, la première fois qu’une femme entre dans une académie pour ses travaux scientifiques. Elle offre aux académiciens les tables astronomiques pour Béziers qu’elle avait compilées à leur intention. Malheureusement ses travaux sont perdus.

En 1764, une éclipse est prévue, pour éviter une éventuelle panique, le clergé est invité à informer le peuple du caractère inoffensif de ce phénomène céleste. Nicole-Reine Lepaute calculera les phases de l’éclipse et en dressera une carte. Elle fera publier deux documents :

Elle meurt, aveugle, le 6 décembre 1783, elle aura passé les trois dernières années de sa vie à s’occuper de son mari loin des mathématiques. Son acte de décès figure sur le site archive.org.

Elle ne reste pas complètement oubliée. Ainsi, quand une nouvelle édition de la Bibliographie ancienne et moderne ou (en nettement plus long) Histoire, par ordre alphabétique, de la vie publique et privée de tous les hommes qui se sont distingués, par leurs écrits, leurs actions, leurs talens, leurs vertus ou leurs crimes paraît en 1820, elle a sa notice relevée ici par le Journal des dames et de la mode. Signée d’un certain M. Weiss, elle porte cette mention :

Mme Lepaute, douée de tous les avantages extérieurs, portoit dans la société cette politesse et cette fleur d’esprit, que semblent exclure les études profondes…

Le numéro du 15 février 1898 du bi-mensuel La Femme (page 28) dresse un portrait de Nicole-Reine Lepaute en ajoutant :

Telle fut la vie pure et simple de celle que Clairaut appelait « la savante calculatrice ». Plus grande lorsqu’elle partageait l’internement de son mari dans une maison de santé que lorsqu’elle compulsait les tables astronomiques.

Et en concluant plus généralement :

« L’examen attentif des faits, des biographies. l’étude de la vérité historique devraient rassurer les esprits chagrins. La famille n’est pas en péril parce que les filles s’adonnent aux mêmes études que les garçons et osent aspirer à des carrières libérales et scientifiques. » Le revenu qu’une jeune fille peut se procurer courageusement, dignement par son travail, à l’aide des diplômes qu’elle a remportés dans les concours par son énergie, sont un appoint pour couvrir les dépenses d’un ménage futur et assurer l’éducation libérale des enfants à venir, qui facilite l’établissement des jeunes époux. Un diplôme, c’est une dot dont la fiancée qui l’apporte dans une corbeille de mariage peut être justement fière, et, loin d’être un obstacle à fonder une famille, c’est une valeur qui favorise le mariage.

Les outils des astronomes au XVIIIe siècle

Il n’est pas possible de savoir ce que Nicole-Reine Lepaute utilisait pour ses calculs. Il est en revanche envisageable de dresser une liste des outils dont les astronomes disposaient pour explorer l’espace et calculer les mouvements des astres.

Pour observer et cataloguer les astres, les astronomes du 18e siècle disposaient des lunettes d’astronomie. La paternité de leur invention est souvent attribuée à Galilée qui a construit sa première lunette en 1609. On trouve une première description de ce type d’instrument déjà en 1538 dans l’Homocentrica (texte-image en latin) de Jérôme Fracastor2. En 1608, l’opticien hollandais Hans Lippershey dépose un brevet pour des lunettes astronomiques qui lui sera refusé, car :

il était notoire que déjà différentes personnes avaient eu connaissance de l’invention. L’optique par Fulgence Marion (texte-image) (source Gallica BnF).

On doit l’invention du télescope à Isaac Newton en 1668. Son idée était d’ajouter un miroir : il fallait pour augmenter la puissance des lunettes astronomiques (et autres longues-vues et jumelles d’ailleurs) augmenter l’épaisseur de la lentille en perdant en précision. L’ajout d’un miroir concave donne une meilleure qualité d’image et permet d’augmenter la taille des télescopes. Est-ce que Lalande ou Nicole-Reine Lepaute pouvaient disposer d’un télescope ? Dans l’Encyclopédie des dames, Lalande mentionne un « un télescope de trente deux pouces qui coûte environ dix Louis » qui suffit pour « voir ce qu’il y a de plus singulier dans le ciel ».

Concernant les outils de calcul : il ne fait aucun doute qu’elle a pu et dû utiliser les différentes tables existantes. À son époque, on utilisait divers abaques pour compter, par exemple un système de jetons, utilisé notamment dans le commerce. Il est possible qu’elle ait eu connaissance, en femme cultivée, de la Pascaline, voire, de la machine à calculer de Leibniz. Mais il est peu probable qu’elle les ait utilisées, notamment parce que ces machines ont été peu diffusées. Elle a pu, en revanche, utiliser les bâtons de Napier (francisé en Neper). Et elle utilisait certainement la bonne vieille méthode du papier et du crayon ou plutôt de la plume, ou « calcul indien » qui est celle que l’on apprend à l’école actuellement. Cette méthode est arrivée en Europe au XIIe siècle et a été adoptée par le monde scientifique assez rapidement mais pas dans les classes les moins instruites de la population.

Nicole-Reine Lepaute aurait pu aussi utiliser une règle à calcul, les premières ont été inventées au XVIIe siècle, mais elles n’ont vraiment commencé à s’implanter en France qu’au XIXe siècle.

Janine Connes, l’astronome

Aussi paradoxal que cela puisse être, il y a encore moins d’éléments biographiques concernant Janine Connes que pour Nicole-Reine Lepaute. Son obituaire ne comporte aucun élément informatif autre que le strict minimum (nom et date). En revanche, on a la liste de ses publications et on peut même accéder à certaines.

De la spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier au centre de calcul d’Orsay

Janine Connes naît en 1926. Elle épouse l’astronome Pierre Connes avec qui elle mènera diverses recherches. Elle meurt le 28 novembre 2024 à Orsay, presque centenaire (98 ans).

En 1954, son professeur, le physicien Pierre Jacquinot lui suggère un sujet de thèse :

Il s’agissait de faire des Transformées de Fourier (TF) de 1 million de points.
Pierre Jacquinot faisait partie de mon jury cette année-là, et à l’issue du concours il m’avait proposé de faire une thèse dans son Laboratoire Aimé Cotton (LAC) alors spécialisé en spectroscopie atomique et développements instrumentaux. Le sujet proposé était la spectroscopie par transformation de Fourier qui théoriquement devait battre en résolution et en étendue spectrale tous les records des réseaux et des interféromètres de Fabry-Perot. (Janine Connes, in De l’IBM 360/75 au superordinateur Jean Zay, chapitre 1).

La spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier (IRTF ou FTIR en anglais) sur laquelle Janine Connes a basé sa thèse est une méthode d’analyse basée sur les ondes infrarouges :

Ces ondes vont de 12 800 cm-1 à 10 cm-1 et sont divisées en trois groupes: le proche infrarouge, le moyen infrarouge et l’infrarouge lointain. La FTIR utilise quant à elle le moyen infrarouge qui s’étend de 4 000 cm-1 à 400 cm-1 (2,5 µm à 25 µm).
Quand une onde infrarouge est envoyée sur une molécule, cette dernière absorbe une partie de l’onde qui correspond aux liaisons présentes dans la molécule. L’absorption du rayonnement infrarouge ne peut avoir lieu que si la longueur d’onde correspond à l’énergie associée à un mode particulier de vibrations de la molécule. (Spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier (FTIR), A. Bonneau, Association des Archéologues du Québec).

Comme on peut le voir, c’est une technique utilisée dans des domaines très différents, incluant donc l’astronomie. Sa thèse en établira les principes en astronomie. Actuellement la :

méthode de Fourier conserve toutefois quelques niches spécifiques, comme dans le domaine de l’infrarouge lointain spatial ou pour la spectroscopie intégrale de grands champs. La spectroscopie de Fourier en astronomie : de ses origines à nos jours, Jean-Pierre Maillard, 21 décembre 2017 (Observatoire de Paris).

La page qui lui est consacrée (en) sur le site CWP (Century Women to Physics) de l’UCLA (Université de Californie à Los Angeles) indique que sa thèse, ainsi que ses publications suivantes, ont été d’une importance majeure et a posé les bases de ce qui allait devenir un nouveau et important domaine de recherche qui rend les transformées de Fourier rapides et relativement courantes :

Janine Connes's analysis of the technique of Fourier Transform Infrared Spectroscopy was of major significance and laid the foundations of what was to grow into a significant new field. Her thesis work and subsequent publications gave in-depth theoretical analysis of numerous practical details necessary for this experimental technique to work. All the more remarkable is that her work predates the age of digital computers, which now make fast Fourier Transforms relatively routine. Mary R. Masson

En 1960, elle écrit avec le physicien H. P. Gush une Étude du ciel nocturne dans le proche infra-rouge dans lequel les deux auteurs remercient notamment le Comité Européen de Calcul Scientifique pour ses attributions d’heures de calcul à l’ordinateur 704 I.B.M.

En 1961, elle publie une série de quatre articles, seule ou avec d’autres chercheurs : Études spectroscopiques utilisant les transformations de Fourier. Pour le professeur Ian McLean, fondateur du laboratoire infrarouge de l’UCLA, ce sont des « travaux fondamentaux d’une importance extrême pour le domaine ». Le travail de Janine et de Pierre Conne sur les transformations de Fourier aura notamment permis à Lewis Kaplan de déterminer, en 1966, la composition de l’atmosphère de Mars (en).

Parallèlement à cela, elle enseigne à la faculté de Sciences de Caen. En 1963, elle sera invitée avec Pierre Connes à rejoindre le Jet Propulsion Laboratory de la NASA à Pasadena. De retour en France, elle commencera par intégrer le laboratoire de Meudon au poste de directrice adjointe avant de se voir confier en 1969 la création et la direction du Centre Inter-Régional de Calcul Électronique (CIRCÉ) à Orsay.

En 1970, l’astronome Ruper Wildt la propose, avec son mari, Pierre Connes, et le physicien Robert Benjamin Leighton pour le prix Nobel de physique pour « leur développement de la méthode de spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier ». Le prix sera attribué, finalement, à Louis Néel.

En 2022, elle écrit avec la participation de Françoise Perriquet : De l’IBM 360/75 au superordinateur Jean Zay 50 ans d’informatique au centre de calcul du CNRS d’Orsay.

Les ordinateurs de ses débuts et le centre Jean Zay

Ce sont l’IBM 704 et l’IBM 360/75 dont on va voir quelques caractéristiques techniques.

L’IBM 704 était la plus grande machine du monde. Il avait fallu deux avions pour la transporter des États-Unis à Orly. Son arrivée en France avait fait l’objet d’une émission de la Radio Télévision française (RTF). Le présentateur interrogeait la personne chargée de réceptionner l’ordinateur au titre de l’Institut européen de calculs scientifiques, une fondation IBM, destinée à offrir aux scientifiques européens (pas seulement français) la possibilité de procéder à des calculs, jusque-là peu envisageables.

Les mentions en italiques sont des citations tirées de l’émission.

L’IBM 704 pesait 21 tonnes. Celui reçu à Orly était composé de « 25 unités différentes constituants chacun autant de petits meubles de dimension normale ». Ne sachant pas ce qu’est un meuble aux « dimensions normales », on peut se donner une idée de la taille des éléments en se référant aux photos : environ la profondeur et la largeur de, disons, une armoire normande, mais en moins haut, quelque chose entre 1,10 m et 1,60 m selon les éléments.

Il fonctionnait avec des bandes magnétiques et pouvait :

  • en physique, s’occuper du dépouillement de données de mesure,
  • faciliter l’exploitation de l’énergie atomique à des fins pacifiques,
  • faire des calculs en chimie,
  • faire des calculs dans tous les domaines de l’industrie et de la science.

Dans l’émission de radio, le présentateur demandait à la fin un exemple de traitement que pouvait faire l’IBM :

Neper a passé plus de trente ans de sa vie à établir les tables de logarithmes et l’ordinateur 704 pourrait exécuter le même travail en le transcrivant sur des bandes magnétiques en dix-sept secondes à peu près.

Sorti en 1954, c’est le premier ordinateur commercialisé à utiliser des commandes arithmétiques en virgule flottante entièrement automatiques et ce grâce à John Backus qui avait insisté pour que ce soit configuré au niveau du matériel.

L’IBM 360/75 qui équipait CIRCÉ faisait partie d’une gamme d’ordinateurs interopérables et polyvalents IBM 360 dont le premier est sorti en 1966 (la numérotation des séries d’ordinateurs chez IBM est étonnante). Les IBM 360 seront commercialisés jusqu’en 1978. Ce sont les premiers à avoir utilisé le système Solid Logic Technology (SLT). L’IBM 360/30 était le plus lent de la série ; il pouvait exécuter jusqu’à 34 500 instructions par seconde avec une mémoire allant de 8 à 64 ko. Le 360/75 est l’un des derniers de la série.

Ces ordinateurs étaient évidemment programmés en FORTRAN. D’ailleurs, le premier compilateur FORTRAN a été écrit pour l’IBM 704.

Le centre Jean Zay, que l’on peut considérer comme l’un des successeurs de CIRCÉ a été inauguré en janvier 2020. C’est l’un des plus puissants centres de calcul d’Europe. Sa puissance est de 125,9 Pétaflop/s. Il a coûté 40 M€, coûte en électricité 3 à 4 M€ par an et il requiert 93 tonnes d’équipement réparti sur 320 m2 (source Ministère de l’enseignement et de la recherche). Il tourne sous Linux évidemment, comme tous les supers calculateurs de sa génération.

Françoise Combes, l’astrophysicienne

Quelle différence y a-t-il entre les métiers d’astronome et d’astrophysicien ? À cette question, wikidifference propose :

La différence entre astronome et astrophysicien est que « astronome » est celui ou celle qui s’occupe d’astronomie tandis que « astrophysicien » est [un ou une] scientifique qui étudie l’astrophysique, l’étude de l’espace et des propriétés des objets de l’univers.

Pas très convaincant, ni explicite. Les astronomes observent et cataloguent l’espace sur la base d’observations quand, en astrophysique, on se base sur les lois de la physique pour observer l’univers. En fait, à l’heure actuelle, les personnes qui, au départ, étaient astronomes sont maintenant des astrophysiciennes : la connaissance a évolué, les méthodes de recherche aussi ainsi que les outils. Mais, évidemment, les astronomes sont, ont été des scientifiques, souvent diplômés en physique.

De la physique galactique à l’Académie des sciences

Françoise Combes naît le 12 août 1952. En 1975, elle réussit l’agrégation de physique ce qui l’amènera à enseigner à l’École normale supérieure (ENS) dont elle est issue. Elle soutient sa thèse d’État à Paris VII en 1980, sujet de la thèse : les dynamiques et les structures des galaxies. En 1985, elle devient sous-directrice du laboratoire de physique à l’ENS (Ulm). Et c’est en 1989 qu’elle devient astronome à l’Observatoire de Paris. Elle est, depuis 2014, titulaire de la chaire Galaxies et cosmologie au Collège de France.

Pendant cette période, 1970 -1980, qui voit la naissance des premières simulations numériques des galaxies, elle a l’idée de les faire en trois dimensions au lieu des deux dimensions habituelles. Elle ainsi pu résoudre :

un mystère jusqu’alors inexpliqué : la formation d’un bulbe (sorte de renflement) dans les galaxies spirales. La clé de l’énigme est la barre centrale, sorte de forme allongée centrale où toutes les étoiles se rassemblent. « Cette barre soulève les étoiles dans la direction perpendiculaire au plan, explique-t-elle. De ce fait, les étoiles ne restent pas confinées dans un disque très mince mais prennent de l’altitude, ce qui forme un bulbe. » Ses simulations ont aussi montré comment la même barre précipite le gaz vers le centre, ce qui a pour effet d’alimenter le trou noir central. Médaille d’or, site CNRS.

Elle a été admise à l’Académie des sciences3 en 2004, une académie dont elle assure la vice-présidence pour le mandat 2023-2024 et qui l’élit à la présidence pour le mandat 2025-2026. Une élection qui devrait normalement être ratifiée par décret par le président de la République. Ce sera la deuxième femme à la tête de cette vénérable institution (elle a été créée en 1666) où elle succède à Alain Fischer et trente ans après la biochimiste Marianne Grunberg-Manago

Des prix prestigieux et des publications

Françoise Combes a engrangé les prix et les distinctions au cours de sa carrière à commencer par le prix de Physique IBM qu’elle obtient en 1986 et le prix Petit d'Ormoy de l’Académie des Sciences en 1993. En 2001, le CNRS lui décerne une médaille d’argent.

En 2009, elle obtient le prix Tycho Brahe de la Société européenne d’astronomie (EAS) dont c’est la deuxième édition pour ses

travaux fondamentaux dans le domaine de la dynamique des galaxies, sur le milieu interstellaire dans les systèmes extragalactiques, sur les lignes d’absorption moléculaire dans le milieu intergalactique et sur la matière noire dans l’Univers. » Communiqué de presse (en anglais) de l’EAS (pdf).

En 2017 la Société Astronomique de France (SAF) lui décerne son prix Jules-Janssen. En 2020, le CNRS lui décerne une médaille d’or. L’année suivante, elle obtient le prix international pour les femmes de sciences L’Oréal-Unesco (en).

Elle est autrice ou co-autrice de plusieurs livres dont les plus récents :

  • Le Big bang, PUF 2024, collection Que sais-je ?, en version papier (10 €) et numérique (PDF et EPUB)
  • Trous noirs et quasars, CNRS éditions 2021, collection Les grandes voix de la recherche, en papier (8 €), numérique PDF et EPUB sans DRM (5,99 €) et audio (9,99 €).

Par ailleurs, l’entretien qu’elle a donné au Collège de France en février 2024 est aussi téléchargeable en PDF.

Sources, références et remerciements

L’illustration de tête est la reproduction de la gravure originale des phases de l’éclipse (je l’ai redessinée avec Inkscape) et on peut la télécharger sur mon site de modèles ainsi d’ailleurs que le CV de Nicole-Reine Lepaute ou sur OpenClipart.

LinuxFr.org ne rend peut-être pas plus intelligent, mais la rédaction de dépêches pour le site rend indéniablement plus savant. Pour cette dépêche et compenser une grande ignorance du sujet, j’ai été amenée à lire, consulter, parcourir ou écouter un certain nombre de documents en plus de ce qui est cité dans le corps de la dépêche. À vous de voir si vous avez envie de poursuivre l’exploration.

Nicole-Reine Lepaute

Janine Connes

  • Spectroscopie du ciel nocturne dans l’infrarouge par transformation de Fourier. J. Connes, H.P. Gush, Journal de Physique et le Radium, 1959, 20 (11), pp.915-917. 10.1051/jphysrad:019590020011091500, jpa-00236163
  • Tous les articles de J. Connes sur HAL Science ouverte, à savoir : il y a un site academia.eu, mieux référencé, qui les propose moyennant une inscription au site, mais cela vient de HAL qui ne demande pas d’inscription (donc pas de courriel) pour le téléchargement des fichiers.
  • Principes & applications de la spectro. de Fourier en astronomie : de ses origines à nos jours, Jean Pierre Maillard, 8 février 2019, conférence mensuelle de la Société astronomique de France (SAF)
  • De l’IBM 360/75 au superordinateur Jean Zay 50 ans d’informatique au centre de calcul du CNRS d’Orsay, EDP Sciences, il existe en version papier (39 €), PDF et EPUB avec DRM LCP (26,99 €), on peut le feuilleter aussi sur le site Cairn Info.
  • Réception à l’aéroport d’Orly de l’IBM 704 qui avait servi à Janine Connes pour ses calculs, podcast France Culture, rediffusion d’une émission de 1957.
  • L’IBM 704
  • l’IBM 360 (es), Academia Lab (2024). Système IBM/360. Encyclopédie. Révisé le 29 décembre 2024.

Françoise Combes

L’histoire de l’astronomie

  • Les télescopes, Gilles Kremer, Sylvie Voisin, 30 mars 2018
  • Histoire et patrimoine de l’Observatoire de Paris
  • Une histoire de l’astronomie, Jean-Pierre Verdet, Seuil 1990, il a fait l’objet d’une publication au format EPUB avec DRM LCP (9,99 €) EAN : 9782021287929, mais on peut le trouver d’occasion assez facilement. Il est doté d’une bonne bibliographie et est plutôt passionnant.

Remerciements

Un très grand merci à vmagnin pour ses informations et ses précisions, même si je n’ai pas tout utilisé. Mais ce n’est pas perdu, un prochain portrait probablement (voire, sûrement).

Merci aussi à Enzo Bricolo pour m’avoir signalé l’élection de Françoise Combes à la présidence de l’Académie des sciences, sans ça je l’aurais ratée et ce serait dommage.

Ainsi se clôt cette série sur les femmes et la conquête de l’espace ainsi que l’année 2024. Et c’est mon cadeau de nouvelle année.


  1. La Connaissance du temps, qui se targue d’être la plus ancienne publication d’éphémérides toujours publiée est actuellement gérée et publiée par l’IMCCE - Observatoire de Paris, la version 2025 vient de paraître et est téléchargeable en PDF. Elle est accompagnée d’un logiciel de calcul d’éphémérides développé pour Windows, Mac et Linux. 

  2. Source : Les lunettes astronomiques, 29 mars 2018, Sylvie Voisin et Gilles Kremer, Le Blog Gallica. 

  3. Une académie qui s’engage en faveur de libre accès et dont les comptes rendus sont publiés depuis 2020 sous licence Creative commons CC BY – SA. 

Aller plus loin

  • # ça dénonce !

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 9 (+6/-0).

    En lisant des articles au sujet du calcul sur la date de retour de la comète de Halley je trouve cet extrait d'un texte de Lalande qui dénonce le fait que la contribution de Mme Lepaute n'a pas été reconnue à sa juste valeur dans le livre de Clairaut :

    "En 1759, Clairaut avait également cité Mme Lepaute dans son livre sur la comète, où il profitait de cet immense travail ; mais il supprima cet article par complaisance pour une femme [Mlle Gouilly] jalouse du mérite de Mme Lepaute, et qui avait des prétentions sans aucune espèce de connaissance. Elle parvint à faire commettre cette injustice à un savant judicieux, mais faible, qu'elle avait subjugué. On sait qu'il n'est pas rare de voir les femmes ordinaires déprécier celles qui ont des connaissances, les taxer de pédanterie, et contester leur mérite, pour se venger de leur supériorité : celles-ci sont en si petit nombre, que les autres sont presque parvenues à leur faire cacher ce qu'elles savent".

    Il faudrait juste remplacer les "femmes ordinaires" par "les êtres humains ordinaires" et ce serait parfait.

    • [^] # Re: ça dénonce !

      Posté par  . Évalué à 2 (+1/-0).

      Il faudrait juste remplacer les "femmes ordinaires" par "les êtres humains ordinaires" et ce serait parfait.

      Y'a carrément rien qui va dans ce paragraphe. À ce compte là, moi aussi je veux bien être féministes X-)

  • # merci

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 7 (+5/-0). Dernière modification le 31 décembre 2024 à 12:03.

    Dépêche super documentée ! (je me demandais d'où venait cette observation d'éclipse au graphisme moderne…)

    Pour ceux et celles qui veulent écouter Françoise Combes, elle intervient souvent sur les chaînes de Radio France : https://www.radiofrance.fr/recherche?term=Fran%C3%A7oise+Combes

    Concernant la lunette astronomique, on dit souvent que Galilée a eu vent des lunettes fabriquées par les opticiens hollandais. A noter que l'instrument pouvait bien sûr avoir des applications militaires. Galilée est considéré comme le premier à l'avoir tourné vers les astres (ou du moins à en avoir rendu compte). A noter que les satellites galiléens (de Jupiter) ont été baptisés Io, Europe, Ganymède et Callisto par un astronome allemand, Simon Marius, qui revendiquait également la découverte. Observer des satellites tourner autour d'un autre astre que la Terre ou le Soleil était un argument fort pour défendre le système copernicien.

    A noter qu'aujourd'hui, une simple paire de jumelles suffit pour observer les galiléens. Jupiter (astre très brillant) est assez haut dans le ciel en début de soirée, direction sud-est. En zoomant dessus dans le logiciel Stellarium, vous pourrez même identifier les quatre satellites. Il n'y a plus qu'à attendre qu'il fasse beau…

    • [^] # Re: merci

      Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 6 (+3/-0).

      Dépêche super documentée ! (je me demandais d'où venait cette observation d'éclipse au graphisme moderne…)

      Fallait bien :-) Pour l’illustration, je ne sais pas ce que tu entends par graphisme, mais c’est la reproduction de la gravure originale avec la police la plus proche possible de la version originale et les mêmes couleurs. Sauf qu’il n’y a pas de fond, j’aurais peut-être dû faire un arrière-plan de la couleur du papier.

      Concernant la lunette astronomique, on dit souvent que Galilée a eu vent des lunettes fabriquées par les opticiens hollandais.

      Il n’y a absolument aucun doute que Galilée ait pu connaître en effet. Contrairement à certaines idées reçues, les idées et les techniques voyageaient en Europe. Pas à la vitesse d’un TGV, certes, mais ça voyageait. C’est, effectivement le ou l’un des premiers à avoir utilisé ces lunettes astronomiques, ou tout au moins, à l’avoir fait savoir. Et il les a améliorées.

      Cela dit, ce que l’on peut constater en histoire des sciences, c’est que souvent les découvertes sont dans « l’air du temps » et qu’il y a plus d’une personne à travailler sur le sujet. L’astronomie en est un bon exemple.

      A noter qu'aujourd'hui, une simple paire de jumelles suffit pour observer les galiléens.

      Je ne serais pas étonnée que les simples paires jumelles soient de meilleure qualité que la lunette astronomique de Galilée.

      « Tak ne veut pas quʼon pense à lui, il veut quʼon pense », Terry Pratchett, Déraillé.

      • [^] # Re: merci

        Posté par  (site web personnel) . Évalué à 6 (+4/-0).

        La lunette de Galilée était faite avec une lunette divergente devant l'oeil (pour avoir une image droite) et ceci implique un tout petit , tout petit champ visuel et très peu de luminosité.
        Les jumelles fonctionnent avec deux lentilles convergentes (des loupes) entre lesquels un prisme est mis : c'est beaucoup plus lumineux. La moindre paire de jumelles de bon prix est indéniablement supérieure a la lunette de Galilée. Mais il avait un meilleur ciel noir.
        Concernant les lunettes astronomiques : deux lentilles convergentes et c'est tout. Très lumineux mais a l'envers (mais osef).

        Concernant la différence entre astronome et astrophysicien.ne… Seul 'astrophysicien' est net : c'est un physicien (et donc qui établit et résout des équations) liés aux astres.
        Astronome par contre… Peut regrouper astrophysicien, contempleur du ciel, armateur, possesseur d'une lunette, d'un télescope.

        Et pour finir… Il y a quelques dizaines d'années j'avais fait une rétrospective sur Jérôme lalande (j'enseigne dans le seul lycée de France portant son nom) et son calcul de la parallaxe lunaire. Les lunettes astronomiques étaient déjà sur son instrument -un gros quart de cercle, gravé finement- et donc, Mme Lepaute y avait accès pour les observations.
        Concernant les télescopes, j'ai parcouru l'astronomie des dames et il cite :"un télescope de trente deux pouces qui coûte environ dix Louis [suffit] pour voir CR qu'il y a de plus singulier dans le ciel. […] c'est là ce que l'on fait voir aux dames lorsqu'elles vont dans un observatoire."
        Donc ils y avaient accès. La question : avec quelle technologie… Actuellement, les télescopes sont fait de miroir en verre (pyrex souvent) recouvert d'une pellicule d'argent qui fait le 'miroir'.
        A l'époque, cela devait plutôt être des miroirs de bronze poli (a étayer).

        Un grand merci a toi pour ces retour sur la place éminente des femmes dans les sciences.
        J'ai eu la chance de rencontrer françoise Combes lors d'un concours de physique auquel participaient 3 de mes élèves (féminines) ce fut un moment extraordinaire pour tous.

        • [^] # Re: merci

          Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 3 (+0/-0). Dernière modification le 01 janvier 2025 à 14:00.

          Concernant la différence entre astronome et astrophysicien.ne… Seul 'astrophysicien' est net : c'est un physicien (et donc qui établit et résout des équations) liés aux astres.
          Astronome par contre… Peut regrouper astrophysicien, contempleur du ciel, armateur, possesseur d'une lunette, d'un télescope.

          Et aussi, je pense sincèrement que le terme d'astrophysicien permet de bien faire la différence entre astronome et astrologue qui sont presque homophones. En cherchant comment définir les différences entre "astronome" et "astrophysicien", le moteur de recherche m'a suggéré "différence entre astronomie et astrologie". Les deux ont été assez longtemps très voisines. Luther par exemple mettait les astronomes et les astrologues dans le même sac. Les astronomes et les astrologues ont utilisé les mêmes tables et, à un moment, se basaient sur la cosmogonie de Ptolémée avec ses décans. L'une des différences (entre beaucoup d'autres mais elle est très significative) c'est que les astrologues règlent toujours leurs calculs sur la cosmogonie de Ptolémée. Et évidemment, les astronomes ne racontent pas n'importe quoi sur la base de leurs calculs.

          Merci pour la précision sur le télescope à dix Louis que j'ai rajouté dans la dépêche. J'aurai dû lire l'Encyclopédie des dames :-)

          « Tak ne veut pas quʼon pense à lui, il veut quʼon pense », Terry Pratchett, Déraillé.

      • [^] # Re: merci

        Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3 (+1/-0).

        Oui, c'était dans l'air du temps. Ce qui est intéressant, c'est que quand on regarde l'étude des lois de la réfraction depuis les savants arabes, il semble que les formules exactes à l'aide de sinus (Snell-Descartes) n'aient été publiées qu'après la diffusion des premières lunettes.

        Un très bon livre sur ces sujets est La lumière par Bernard Maitte. Il dit qu'en 1608, on trouve la longue-vue en vente chez les meilleurs opticiens de Paris. Elle a peu de succès car "elle grossit à peine trois fois des objets qu'elle montre déformés et irisés." Galilée améliore le polissage et le choix des verres. Sa lunette fait 51 mm de diamètre.

        Il est certain que des jumelles actuelles sont de bien meilleure qualité. Mais Galilée voit quand même les montagnes de la Lune, il résout les étoiles de la Voie lactée, il observe des excroissances autour de Saturne (les anneaux), les phases de Vénus, les satellites galiléens… Quand aux étoiles, elles restent ponctuelles. "Galilée est bouleversé, au comble de l'excitation il passe tout son temps, toutes ses nuits à observer, observer encore…"

        • [^] # Re: merci

          Posté par  . Évalué à 3 (+2/-0).

          Ce qui est intéressant, c'est que quand on regarde l'étude des lois de la réfraction depuis les savants arabes, il semble que les formules exactes à l'aide de sinus (Snell-Descartes) n'aient été publiées qu'après la diffusion des premières lunettes.

          Tout à fait, Snell c'est 1621, Descartes 1634 (mais vraisemblablement indépendamment) mais à côté de ça, le maître d’Alhazen, Ibn Sahl, a semble-t-il laissé un gribouillage avec une construction géométrique qui reprend la loi des sinus par projection. Et là on est encore au 10ᵉ siècle.
          Les idées et le formalisme sont parfois un peu décorrélés.

          Quand aux étoiles, elles restent ponctuelles.

          Il y a peut-être (probablement) une différence visuelle entre une étoile et une planète à travers la lunette de Galilée mais vu la construction de sa lunette il y a fort à parier que la diffraction et autres défauts optiques ne rendent les étoiles pas du tout ponctuelles.

          Ensuite que Galilée ait perçu la différence cela ne serait pas du tout étonnant, mais il faut un œil et surtout un esprit exercé. Il a par exemple pris les trois premiers satellites de Jupiter pour des « fixes » avant de remarquer le lendemain que Jupiter ne s'était pas déplacé comme prévu par rapport à ces « fixes ». Il a d'abord envisagé une rétrogradation tout à fait anormale.

          • [^] # Re: merci

            Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3 (+1/-0).

            Il y a peut-être (probablement) une différence visuelle entre une étoile et une planète

            Perso j'avais à l'esprit que les étoiles « scintillent » et les planètes « errent ». Fait connu depuis assez longtemps j'imagine et déjà du temps de Galilée. J'imagine que la lunette de Galilée n'annule pas le scintillement.

            Adhérer à l'April, ça vous tente ?

            • [^] # Re: merci

              Posté par  (site web personnel) . Évalué à 2 (+0/-0).

              Effectivement, à l’œil nu les planètes ne scintillent pas car elles ont un diamètre apparent non négligeable, même si inférieur au pouvoir de résolution de notre œil. Les étoiles scintillent avec la turbulence atmosphérique.

              • [^] # Re: merci

                Posté par  . Évalué à 3 (+2/-0).

                En ville, même Jupiter scintille tellement l’atmosphère est agitée 😩

          • [^] # Re: merci

            Posté par  (site web personnel) . Évalué à 4 (+2/-0). Dernière modification le 02 janvier 2025 à 12:49.

            Il a bien vu les phases de Vénus et les "excroissances" de Saturne, donc les planètes n'étaient pas ponctuelles. Pour les étoiles, c'est sûr qu'elles devaient former une tâche un peu étalée et irisée. D'ailleurs, même avec une optique parfaite, les étoiles ne sont pas réellement ponctuelles à cause de la diffraction (Tache d'Airy).

            Et effectivement, pour voir quelque chose il faut non seulement un bon instrument mais aussi être préparé à voir ce quelque chose. Par exemple pour les anneaux de Saturne, c'est Huygens qui va évoquer la possibilité que Saturne soit entourée d'un anneau. C'est une hypothèse audacieuse car à l'époque ça devait vraiment être une idée étrange : un anneau autour d'une planète…

  • # La science moderne face à la complexité et son inévitable besoin de changer d'échelle.

    Posté par  . Évalué à 6 (+4/-0).

    Merci pour cette dépêche !

    Une des conf les plus sympa d'astro que j'ai vu cette année, est celle de Sandrine Vinatier en visio à l'observatoire de Paris. Dispo sur le Tube. Cela concerne l'exploration de Titan, et c'est passionnant. C'est à la fois un défi technique et scientifique, et une véritable aventure, même si ce sont désormais des robots qui en sont les protagonistes directement impliqués !

    Une remarque pour approfondir un peu la réflexion sur la science et ces acteurs. Dans l'histoire de la science, il fut un temps où les grandes découvertes étaient surtout le fait de personne exceptionnelles, d'individus inspirés, de savants géniaux. C'est encore peut-être un peu le cas, mais ça devient vraiment l'exception. Le progrès scientifique moderne n'est plus l'affaire d'individus géniaux, mais c'est avant tout une affaire collective. Certain diront même que c'était déjà le cas avant certes. Les célèbres nains sur les épaules de géants

    Reste qu'aujourd'hui, cela a pris une toute autre dimension. Et c'est surement un des effets de la complexité.

    L'étude des systèmes complexe demande de facto de l'interdisciplinarité. J'ai un exemple amusant pour illustrer ça, même si je doute de sa justesse. Mais imaginons un climatologue, étudiant le réchauffement de l'atmosphère et en déduisant qu'il provient, entre autre, du taux de CO² qu'elle contient. Ce taux augmente de façon plus ou moins constante, sauf durant une petite période de quelque années. Comment imaginer expliquer cela d'un point de vue climatologique alors que la cause racine de cette baisse temporaire est due à la mutation dans l'ARN d'un virus en Chine entrainant une pandémie planétaire ?

    Les systèmes complexe ont cette propriété de ne pouvoir être étudiés par une simple méthode réductionniste isolée. Cette méthode qui consiste à diviser les problèmes complexe en sous-problème plus simple à résoudre échoue car certains effets n'existent qu'a l'échelle complète du système et du fait de l'interdépendance des systèmes entre eux. Dans notre histoire de virus qui fait baisser le taux d'augmentation du CO² dans l'atmosphère d'une planète, il faut pour expliquer cela, de la virologie, de la biologie, de l'écologie, de la médecine, de l'économie, de la géopolitique, de la sociologie, de la physique, de la géophysique et de la climatologie (et j'en oublie surement).

    Beaucoup de sciences modernes sont confronté à ça. L'écologie, l'économie, la psychologie cognitive et les neurosciences, par exemple, et dans une certaine mesure, l'informatique, ou des technologie comme l'IA sont à la fois une solution à ce type de problèmes tout en étant aussi un problème de ce type à résoudre, puisqu'on ne sait pas vraiment encore expliquer, en tout cas il me semble, pourquoi ça marche aussi bien.

    Faut pas gonfler Gérard Lambert quand il répare sa mobylette.

    • [^] # Re: La science moderne face à la complexité et son inévitable besoin de changer d'échelle.

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 2 (+0/-0).

      Dispo sur le Tube

      pas le bon — vu que c'est toi qui t'es trompé — je te laisse retrouver le bon sur https://astrotube.obspm.fr/ :D eh oh hein !

      L'étude des systèmes complexes demande de facto de l'interdisciplinarité

      ça va de soi, non ?

      ne pouvoir être étudiés par une simple méthode réductionniste isolée. Cette méthode qui consiste à diviser les problèmes complexe en sous-problème plus simple à résoudre échoue car certains effets n'existent qu'a l'échelle complète du système et du fait de l'interdépendance des systèmes entre eux.

      moui démarche de base d'ingénieur, qui a aussi le holisme comme corde à son arc ;-)

      L'écologie, l'économie, la psychologie cognitive et les neurosciences, par exemple, et dans une certaine mesure, l'informatique

      eh oh, trouve-moi un mouton à 5 pattes avant :-) sachant que pour faire passer la psycho pour une science (dure), ça va te demander pas mal de boulot (ça a des apports, ça je ne le remets pas en cause, ya la PNL qui permet de comprendre des choses)

      pourquoi ça marche aussi bien.

      tu aurais des exemples concrets ? (URL ?)
      l'IA j'en vois plutôt les limites voire les dérives (je parle des LLM génériques, d'autres trucs en IA fonctionnent bien en affichant un niveau de confiance pertinent effectif).

      • [^] # Re: La science moderne face à la complexité et son inévitable besoin de changer d'échelle.

        Posté par  . Évalué à 3 (+1/-0).

        pas le bon — vu que c'est toi qui t'es trompé — je te laisse retrouver le bon sur https://astrotube.obspm.fr/ :D eh oh hein !

        Pas trouvé. mais content de savoir que ça existe. Merci. Cela dit, le séminaire de Sandrine Venatier vaut vraiment le détour, si on est intéressé par le sujet évidement.

        Dans mes autres bon plan de cette année sur l'astro, il y a l'excellent cours au collège de France d'Alessandro Morbidelli (malheureusement, le collège de France, c'est aussi sur Youtube).

        Le titre fait un peu peur, mais c'est tout a fait abordable, en particulier la leçon inaugurale. En résumé, ça parle du coté "exceptionnel" de notre système et de l'extraordinaire diversité des systèmes planétaire en général. Un élément de plus qui va dans le sens de la complexité.

        Plus ou moins sur le même sujet, mais sous une forme plus abordable de conférence grand public, il y a celle là, à l'espace de science de Rennes que j'ai trouvé aussi intéressante : Seuls dans l’Univers ! de Jean-Pierre Bibring.

        Et si vraiment, on a du mal avec le format cours/conférence/séminaire, dans la même idée, il y a cet épisode récent de Balade Mentale : Le 0,1 % cosmique. Combien de planètes Terre dans l'Univers ?

        (C'est encore du Youtube, mais j'ai un peu de karma en stock, je devrais survivre ;-).

        Mais comme le thème de la dépêche était un peu "honneur aux femmes scientifique", j'ai mis plutôt en avant cette excellent séminaire sur l'exploration de Titan.

        Pour le reste, c'est juste des réflexions un peu philosophique de ma part. Je répondrais juste que si la psychologie n'est pas une science "dure", ce n'est pas de sa faute, c'est juste que les sciences "dures" échouent peut-être à expliquer les phénomènes qu'étudie la psychologie. Que cet échec est justement peut-être due à une approche un peu trop réductionniste de systèmes complexe.

        Sur le sujet, je connais Albert Moukheiber qui passe justement pas mal de temps dans les médias a lutter contre les idées reçue dans le domaine. Vu son activité dans les média, on trouvera facilement des sources sur son media préféré. (Mais j'ai trouvé son dernier bouquin, Neuromania, vraiment bien).

        Faut pas gonfler Gérard Lambert quand il répare sa mobylette.

    • [^] # Re: La science moderne face à la complexité et son inévitable besoin de changer d'échelle.

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3 (+1/-0). Dernière modification le 01 janvier 2025 à 12:13.

      Mais imaginons un climatologue, étudiant le réchauffement de l'atmosphère et en déduisant qu'il provient, entre autre, du taux de CO² qu'elle contient. Ce taux augmente de façon plus ou moins constante, sauf durant une petite période de quelque années. Comment imaginer expliquer cela d'un point de vue climatologique alors que la cause racine de cette baisse temporaire est due à la mutation dans l'ARN d'un virus en Chine entrainant une pandémie planétaire ?

      Dans les faits, on ne voit même pas l'effet du COVID sur la courbe de Keeling :
      https://gml.noaa.gov/ccgg/trends/mlo.html

      Même au niveau de la dérivé, rien de flagrant :
      https://gml.noaa.gov/ccgg/trends/gr.html

      A noter que malheureusement le taux n'augmente pas de "façon plus ou moins constante". Non seulement il n'y a aucun ralentissement, mais le taux d'accroissement annuel augmente de plus en plus. Il est actuellement autour de +3 ppm par an. Le taux de CO2 depuis 1958 s'interpole très bien avec une parabole (avec un terme en x² positif).

      • [^] # Re: La science moderne face à la complexité et son inévitable besoin de changer d'échelle.

        Posté par  . Évalué à 3 (+1/-0).

        Oui, j'avais un doute justement. Mais comme on a permanence ce discours sur "il faut réduire nos émissions, la sobriété, etc …" on pourrait s'attendre à ce que la pandémie ait pu avoir un effet significatif, mais en réalité, même si il y a eu effectivement une baisse sensible de certaines sources d’émissions, le système a quand même beaucoup trop d'inertie pour que cela soit perceptible en moyenne et à l'échelle globale.

        Le seul moyen d'enrayer le phénomène semble être de renoncer définitivement à toute utilisation de carbone fossile, à l'échelle mondiale et encore … Ce qui semble quasi impossible, mais en plus, ne serait-ce qu'une simple réduction ne semble même plus à l'ordre du jour pour beaucoup.

        C'est assez décourageant. Enfin, bonne année quand même.

        Faut pas gonfler Gérard Lambert quand il répare sa mobylette.

        • [^] # Re: La science moderne face à la complexité et son inévitable besoin de changer d'échelle.

          Posté par  (site web personnel) . Évalué à 2 (+0/-0). Dernière modification le 01 janvier 2025 à 15:11.

          le système a quand même beaucoup trop d'inertie pour que cela soit perceptible en moyenne et à l'échelle globale.

          On a continué à manger, à se chauffer (ou à se climatiser), à faire fonctionner nos appareils, etc. Il y a eu une baisse de l'activité industrielle et des transports (mais par pour la nourriture et beaucoup de biens), etc. Mais sur la première figure de cette page, on voit que nous avons émis seulement 5,7 % de CO2 en moins en 2020 ! Donc ce n'est pas étonnant que ça ne se voit pas dans la quantité de CO2 qui s'accumule dans l'atmosphère. C'est sûr que -5,7 %, c'est surprenant par rapport à la perception de ce que nous avons vécu (on aurait pensé intuitivement plutôt à au moins -30 %)…

          J'avais lu en 2024 qu'une étude montrait que la température à la surface de la Lune avait légèrement varié durant le COVID : moins de nuages (avions, etc.) donc moins de lumière solaire réfléchie vers la Lune… Je ne sais pas si ça a été confirmé.

          Bonne année à toi aussi !

          Ca nous ramène effectivement à la réalité…

  • # merci (2)

    Posté par  . Évalué à -5 (+1/-3). Dernière modification le 01 janvier 2025 à 09:12.

    Au risque de paraître naïf je vais vous raconter mon expérience avec cette dépêche. J'en suis pas fier mais bon.
    J'étais venu chercher des infos sur mon système linux et là je suis tombé sur cette dépêche et ça a totalement changé mon point de vue sur un tout autre sujet en fait.
    D'abord je me laisse pas facilement enfumer en général mais là je sais pas j'ai vu une news comme quoi la terre était plate (!!) J'avoue un moment je me suis laissé séduire par le style qui avait l'air sérieux et scientifique. En général je fais attention mais ils avaient une manière de présenter le truc qui le rendait possible.
    Bref en lisant votre article je me suis rendu compte que c'était pas possible tout simplement.
    Donc je vous dis merci pour votre travail de vulgarisation et pas seulement dans le domaine de l'informatique! 👌

    • [^] # Re: merci (2)

      Posté par  . Évalué à -6 (+1/-4).

      Il m'est arrivé un peu la même chose pendant le vaccin. Je m'étais laissé instiller le doute par des gens qui doutaient de sa valeur scientifique et même qui doutaient de l'existence de la science ! Les fous… Bref il faut faire attention sur le net.

    • [^] # Re: merci (2)

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3 (+1/-0).

      Ce qui est plat, ce sont les écrans. Les Grecs antiques ne regardaient pas le monde derrière leurs écrans, ils regardaient les bateaux disparaître progressivement à l'horizon (à un moment on ne voyait plus que le mât), ou la forme de l'ombre de la Terre lors d'une éclipse de Lune.

      • [^] # Re: merci (2)

        Posté par  . Évalué à 2 (+1/-0).

        Ils étaient tellement convaincus qu’Eratosthène en a calculé le rayon alors qu’il aurait pu, avec la même observation, calculer l’altitude du soleil au dessus d’une terre plate.

    • [^] # Re: merci (2)

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 2 (+0/-0). Dernière modification le 01 janvier 2025 à 13:37.

      Ca pose aussi le problème du sophisme. Le langage peut être syntaxiquement correct et sembler bien argumenté tout en étant trompeur.

      D'ailleurs avec les GPT, le texte semble généralement cohérent (et est souvent juste), malgré parfois des imprécisions ou des erreurs, car ils ne font que manipuler du langage.

      Il faut sortir du langage, c'est ça aussi la méthode scientifique : observer, faire des expériences, etc. Pour faire le tri dans les énoncés du langage.

      Analogie informatique : c'est pas parce que le code source compile qu'il n'y a pas de bug. Il faut exécuter sur une machine pour voir (il faut sortir du langage).

    • [^] # Re: merci (2)

      Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 5 (+2/-0).

      J'avoue que je ne sais pas comment interpréter ça. Et je ne vois pas de rapport avec la terre plate.

      « Tak ne veut pas quʼon pense à lui, il veut quʼon pense », Terry Pratchett, Déraillé.

      • [^] # Re: merci (2)

        Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3 (+1/-0).

        Effectivement, dans ton article rien ne semble concerner la forme de la Terre. Mais peut-être qu'un des liens que tu donnes l'a amené à y réfléchir. Diffuser de la connaissance scientifique est plus que jamais nécessaire. Le sujet est sérieux. Ciel & Espace a même publié un Hors-Série n°40 en juillet 2021 intitulé Fake news dans le ciel - une histoire des canulars et des complotismes. Le rédac-chef, Alain Cirou, dit dans son édito que 3191 classes scolaires ont reçu un exemplaire de ce hors-série grâce à la campagne de dons qui avait été organisée par le magazine auprès de son lectorat.

        Donc bravo pour ces dépêches contenant de la science.

  • # Date de naissance de Janine Connes ?

    Posté par  . Évalué à 3 (+3/-0).

    Merci pour cette dépeche super intéressante 😀!

    Je crois cependant qu'il y a un problème sur l'année de naissance de Janine Connes. Selon wikipedia, elle est née en 1926, ce qui fait bien 98 ans à sa mort, et non pas en 1934 comme mentionné dans la dépêche.

    Super merci pour ce travail en tous cas !

    • [^] # Re: Date de naissance de Janine Connes ?

      Posté par  . Évalué à -8 (+0/-5).

      Et donc la crise économique a eu lieu en l'an 3 après JC et non pas ce qu'ils disaient dans certain média conspi que je préfère pas citer pour pas leur faire de la pub.

    • [^] # Re: Date de naissance de Janine Connes ?

      Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 5 (+2/-0).

      L'autrice de cette dépêche a du mal à compter jusqu'à vingt, ce qui déjà est un mauvais point de départ, ensuite, j'ai repris l'année marquée sur une de mes sources sans vérifier ailleurs (je ne suis pas la seule fâchée avec les nombres on dirait). Pas de bol.

      C'est corrigé, merci pour la précision.

      « Tak ne veut pas quʼon pense à lui, il veut quʼon pense », Terry Pratchett, Déraillé.

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