Profitons de la torpeur estivale et de la chaleur accablante (mais pas ici) pour revenir sur plein de petites actualités autour du vote électronique (par ordinateurs de vote ou par Internet). Dans la seconde partie de la dépêche, il sera notamment question d'ordinateurs de vote à la benne, de scrutin annulé, d'effet Streisand, de contentieux électoral, des RMLL 2012, des questions écrites sénatoriales, des blagues potaches et d'open data sur les villes françaises avec ordinateurs de vote.
Sommaire
Revue de presse
- l'Irlande a envoyé à la benne ces 7500 ordinateurs de vote (autre article en français), qui lui auront coûté au total 54 millions d'euros (moins le gain de 70k€ du recyclage…). Leur utilisation avait été bloquée en 2009 car elles posaient trop de problèmes.
- en juin, l'Union Départementale du Finistère du syndicat Force Ouvrière a obtenu l'annulation en justice d'élections professionnelles organisées par voie électronique car les garanties sur la sécurité n'étaient pas suffisantes.
- une petite pensée pour ATOS pour avoir mis en demeure Numerama de supprimer son document sur le vote électronique, et pour l'effet Streisand produit.
- en juin, le parti UMP a opté pour un scrutin papier pour sa présidence : « Nous avons pris la décision de procéder à un vote papier plutôt qu'à un vote électronique, essentiellement pour des raisons de coût. Le vote électronique représente un coût quand même très élevé »
- la Mongolie a montré qu'un scrutin électronique pouvait prendre longtemps à dépouiller.
Contentieux en cours
- le Parti pirate a déposé une requête en annulation contre le vote par Internet - à laquelle j'ai contribué - dans le cadre de l'élection législative de la 4ème circonscription des Français de l'étranger. Bonne nouvelle, elle a atteint l'instruction contradictoire (elle fait partie des 55 restantes, tandis que le Conseil Constitutionnel en a rejeté 27 le 13 juillet et 26 le 20 juillet).
- le Parti pirate veut faire reconnaître en France l'inconstitutionnalité du vote électronique, et rappelle au passage que la Cour constitutionnelle fédérale d'Allemagne a, en mars 2009, sanctionné l'emploi de machines à voter électronique.
- on notera aussi l'utilisation d'un outil de « démocratie liquide » au sein du Parti pirate français, commentée récemment par polnetz.
Présentations récentes
(nb: je n'ai pu assister à aucune des deux présentations citées)
- une présentation a eu lieu dans le thème sécurité des RMLL 2012 à Genève par Stéphane Glondu, intitulée Élections en ligne vérifiables avec Helios, qui se conclut par « le vote électronique est possible sans confiance aveugle… mais il n'est pas prêt pour replacer le scrutin papier » (problèmes : fuite possible du vote de l'électeur, repose sur la sécurité de l'ordinateur du votant, complexité de la cryptographie et de l'informatique pour le votant lambda, etc.)
- une autre présentation a eu lieu dans le thème politique des RMLL 2012 par Emmanuel Charpentier intitulée Voter par internet
Débats parlementaires
- les questions écrites n°23657 du sénateur Alain Anziani sur la fiabilité des systèmes de vote par internet, et n°00003 du sénateur André Gattolin (la même sur son site) sur l'utilisation des machines à voter sont pour l'instant sans réponse.
- sauf erreur de ma part, il n'y a pas encore de questions écrites sur le sujet côté Assemblée nationale dans le cadre de la nouvelle législature.
- question ouverte : la possibilité pour chaque électeur de pouvoir comprendre et vérifier une élection sera-t-elle clarifiée dans une prochaine réforme de la Constitution française ? Ou sera-t-elle (ré)affirmée par le Conseil Constitutionnel ?
Et moi et moi et moi
- j'ai recensé et publié le fichier des 65 (sur 64 annoncées dans la presse ?) communes françaises avec ordinateurs de vote.
- grâce à la 4è circonscription des Français de l'étranger, j'ai découvert la possibilité de vote nul par internet (écart de 1 par rapport aux émargements).
- ma conférence « Vote électronique : en quoi le logiciel libre n'est pas la solution » a été entièrement transcrite par l'April.
- les ordinateurs de vote d'Issy-les-Moulineaux avaient leur préférence : "Andr♥ Santini" contre "Lucile Schmid", avec UnderVote en guest-star (oui on vote en franglais à Issy).
- le tableau comparatif vote par bulletins papiers, vote par ordinateurs de vote, vote par internet (France) déjà évoqué ici a été mis à jour depuis.
# Conclusion de Stéphane Glondu
Posté par Christophe . Évalué à 6.
Merci pour ce résumé sur le vote électronique, ça clarifie bien les choses :)
Pour la conclusion de Stéphane Glondu, après avoir lu sa présentation, je trouve sa formule plutôt optimiste face à la réalité. Malgré une théorie du cryptage franchement avancée, un anonymat absolument inexplicable au votant moyen, bref en y mettant franchement du sien pour développer un système de vote électronique anonyme et sécurisé, tout cela est balayé en une phrase: on doit supposer que la machine est fiable.
Il n'y a pas l'ombre d'une solution pour ce problème. Plutôt que la formule utilisée par Stéphane Glondu, j'aurais donc conclu (AMHA) que le vote électronique comporte encore des problèmes majeurs non résolus qui devraient être bloquants aujourd'hui.
Mais pas si bloquants que ça, pour nos dirigeants actuels, manifestement…
[^] # Re: Conclusion de Stéphane Glondu
Posté par mart-e (site web personnel) . Évalué à 1. Dernière modification le 22 juillet 2012 à 09:37.
Je suis d'accord qu'il y a certains points qui ne peuvent être réglés comme le fait que l'on doit supposer que la machine n'a pas été corrompue (et encore ils ont +/- la solution avec Remotegrity) mais je ne suis pas d'accord sur le fait qu'il soit donc moins bon que le vote papier. Le vote électronique bien fait, notamment avec des systèmes tels qu'Helios, apporte une série de garantie qu'on ne peut avoir avec le vote papier comme les urnes publiques et vérifiables. Et je ne suis toujours pas d'accord que devoir être capable d'expliquer le système au votant moyen est un pré-requis nécessaire mais bon, c'est mon avis…
J'avais exprimé mon opinion complète à ce sujet il y a quelques temps : Le vote électronique sécurisé et transparent est possible
[^] # Re: Conclusion de Stéphane Glondu
Posté par ZeroHeure . Évalué à 3.
C'est intéressant. Cependant j'ai du mal à comprendre où est la garantie, dans le cadre d'un pays faussement démocratique (une dictature qui fait voter) ou d'un pays accédant à la démocratie. En effet, qui contrôle les machines de votes, si ce n'est les gouvernants? En outre l'envoi de codes pour voter est assez dangereuse, parce qu'il est facile d'intervertir ces codes en amont.
D'une façon générale, je trouve l'ordinateur de vote dangereux parce que dans une dictature il facilitera la fraude, or l'occident sert de modèle pour les autres pays en majorité non démocratiques, quand ce n'est pas le néo-colonialisme qui justifie son aide au matériel électoral par la modernisation (et se permet donc le contrôle des résultats) [voir par exemple l'opuscule de François-Xavier Verschave De la françafrique à la mafiafrique, Bruxelles (2004): éditions Tribord, pour une découverte ou ses gros bouquins sur la "françafrique" pour approfondir.]
Cependant l'apport des nouvelles technologies est tout à fait intéressant, en voici un cas réel, qui explicite mes inquiétudes:
il y a eu au Sénégal l'une des élections africaine les plus démocratique, grâce à l'emploi des téléphones portables et des radios libres locales: les bureaux de vote téléphonaient le résultat du dépouillement des urnes papier aux radios qui l'annonçait, empêchant l'habituelle fraude gouvernementale lors de la totalisation des résultats. Cette fraude était organisée par les réseaux de la françafrique pour maintenir au pouvoir des gouvernants obéissants [voir par exemple le même opuscule de François-Xavier Verschave, page 21].
A me relire, je crois que je ne suis pas très clair, désolé…
"La liberté est à l'homme ce que les ailes sont à l'oiseau" Jean-Pierre Rosnay
[^] # Re: Conclusion de Stéphane Glondu
Posté par briaeros007 . Évalué à 5.
j'ai lu rapidement la présentation et ton billet.
je ne vois pas comment on peut empêcher un bourrage d'urne avec un tel système :
comment on peut vérifier le décompte globale ?
comment on peut être sur que derrière chaque bulletin il y a un votant "valide" ?
Par exemple tu dis que tu chiffres ton message, et que tu l'envoie sur un serveur, et tu arrives a conclure "donc on peut voir que personne n'a rajouter de message".
Comment ?
Tu as le secret que de ton bulletin, pas de celui des autres.
Tu indique que pour calculer la somme (et donc la vérifier), il faut faire partie des "trustee". Dans les élections papier, il suffit d'être présent -enfin présent dans chaque commune-.
Moi je trouve ça maigre. Je ne fais pas confiance à "n personnes", où n<<m, surtout quand de gros intérêts sont en jeux. Certains sont prêts à mettre de coté leurs convictions personnelles pour obtenir un bon avantages (sans parler d'autres moyens possibles. Il est plus facile de compromettre n personnes que m si n<<m).
Enfin tu termines en disant
J'espère que tu sais que les médecins des fois se trompent, et que pas mal d'expert ne sont pas d'accord entre eux.
Donc si tu as une "tétrachié" d'expert qui disent un truc, je peux te trouver une autre "tétrachié d'expert" qui pousseront pour une autre solution ou autre.
Ben désolé, moi je préfère comprendre un minimum avant de faire confiance à un truc. La façon de faire "d'autres savent mieux que moi", on a déjà vu ce que ça a donné.
[^] # Re: Conclusion de Stéphane Glondu
Posté par FantastIX . Évalué à 2.
Que fais-tu de tous ceux qui se foutent de/ne veulent pas/croient comprendre? Je crois qu'une bonne partie de ceux-là seraient prêts à déléguer la tâche à n'importe qui d'autre, tellement ça les dépasse.
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